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AstraZeneca présente sa défense face à Pfizer

Le laboratoire pharmaceutique britannique AstraZeneca a présenté mardi ses moyens de défense face aux avances pressantes de son homologue américain Pfizer, anticipant une hausse de 75% de son chiffre d'affaires dans les 10 ans à venir, hausse qui serait toutefois précédée d'un recul préalable. /Photo d'archives/REUTERS/Stefan Wermuth

par Ben Hirschler

LONDRES (Reuters) - Le laboratoire pharmaceutique britannique AstraZeneca a présenté mardi ses moyens de défense face aux avances pressantes de son homologue américain Pfizer, anticipant une hausse de 75% de son chiffre d'affaires dans les 10 ans à venir, hausse qui serait toutefois précédée d'un recul préalable.

S'il s'attend à une baisse de son chiffre d'affaires au cours des trois prochaines années en raison de l'expiration de plusieurs brevets, le groupe britannique assure tabler sur une croissance "forte et constante" de 2017 à 2023, grâce à de nouveaux traitements du cancer, du diabète ou encore des maladies cardiaques et pulmonaires.Le chiffre d'affaires dépasserait ainsi les 45 milliards de dollars (32,3 milliards d'euros) d'ici 2023 contre 25,7 milliards réalisés en 2013, et vendre à Pfizer maintenant priverait les investisseurs d'une plus-value énorme, a affirmé AstraZeneca.

La croissance du bénéfice brut par action devrait être supérieure à celle du chiffre d'affaires sur cette période, a-t-il ajouté.

"Nous sommes engagés dans une course avec bon nombre de nos concurrents afin d'amener le plus rapidement possible nos produits sur le marché", a dit le directeur général Pascal Soriot. "Toute source créatrice de perturbation peut en puissance détruire de la valeur".

Investisseurs et analystes conviennent qu'AstraZeneca dispose d'un meilleur portefeuille de médicaments expérimentaux dans des domaines variant de l'oncologie à l'asthme mais l'avenir commercial incertain de bon nombre d'entre eux les rend dubitatifs.

Les investisseurs s'intéressent surtout aux traitements oncologiques expérimentaux d'AstraZeneca, destinés à stimuler le système immunitaire et censés révolutionner le traitement de plusieurs catégories de tumeurs. Ces médicaments complèteraient avantageusement la propre offre oncologique de Pfizer.

Mais dans ce domaine, AstraZeneca est à la traîne de concurrents tels que Bristol-Myers Squibb, Merck & Co et Roche Holding.

Pour autant, AstraZeneca projette des ventes qui pourraient culminer à 6,5 milliards de dollars pour son traitement oncologique expérimental d'immunothérapie MEDI4736, celui qui suscite le plus l'intérêt des analystes et des investisseurs.

Le laboratoire a dit en avril qu'il comptait accélérer les essais cliniques de Phase III à la suite de l'évaluation de données positives de Phase I qui seront présentées lors de la conférence de l'ASCO (American Society of Clinical Oncology) du 30 mai au 3 juin.

LE PARLEMENT À LA POINTE DE L'ENQUÊTE

Un élément peut-être trop tardif pour peser dans la balance dans la mesure où Pfizer doit préciser d'ici le 26 mai s'il entend lancer une OPA en bonne et due forme ou y renoncer, comme l'y oblige la réglementation britannique.

AstraZeneca a rejeté par trois fois les propositions de Pfizer, qui veut créer le premier groupe pharmaceutique mondial et réduire ses impôts en changeant de domicile fiscal. Mais, selon des sources proches du dossier, il ne serait pas opposé à une meilleure offre.

Jusqu'à présent Londres est resté neutre sur ce dossier, notamment parce que Pfizer n'a pas encore soumis d'offre ferme, mais en coulisses le gouvernement invite chaudement le groupe américain à s'abstenir de toute coupe claire dans les départements de recherche, ont dit des sources industrielles.

L'éventualité de voir le deuxième laboratoire britannique derrière GlaxoSmithKline tomber dans le giron américain ne peut laisser les autorités britanniques indifférentes car AstraZeneca joue un rôle crucial dans le secteur des sciences de la vie et il emploie près de 7.000 personnes au Royaume-Uni.

C'est ainsi que des délégués des deux groupes seront convoqués par une commission parlementaire, sans doute la semaine prochaine. Le Parlement britannique avait fait savoir à la toute fin d'avril qu'il comptait bien enquêter sur une OPA qui représenterait quelque 106 milliards de dollars (76 milliards d'euros).

Londres continuera de discuter avec Pfizer et AstraZeneca mais tout accord qui pourrait intervenir entre les deux laboratoires relèvera d'une décision purement commerciale, a dit de son côté un porte-parole du Premier ministre David Cameron.

Avant la présentation de sa stratégie, AstraZeneca a annoncé mardi avoir reçu l'autorisation de mise sur le marché américain d'un médicament contre les maladies cardiaques, un feu vert présenté par le groupe comme le signe d'une bonne exécution de sa stratégie.

L'action AstraZeneca perdait 2,73% à 46,77 livres en Bourse de Londres alors que l'indice européen regroupant les valeurs pharmaceutiques cédait 0,54%. A Wall Street, Pfizer abandonnait 0,6% à 29,78 dollars.

(Benoit Van Overstraeten et Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Véronique Tison)