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Les arrêtés municipaux pour interdire la consommation du gaz hilarant se multiplient

De plus en plus de jeunes de 12 à 16 ans utilisent le protoxyde d'azote pour se droguer.  - Brightcove
De plus en plus de jeunes de 12 à 16 ans utilisent le protoxyde d'azote pour se droguer. - Brightcove

En l'espace de quelques mois, le phénomène s'est peu à peu transformé en enjeu sanitaire majeur. Dans plusieurs villes françaises, passants et automobilistes ont pu se rendre compte de l'apparition de petites cartouches métalliques jetées à même le sol, parfois en grande quantité. Derrière cette pollution se cache une réalité parfois tragique, celle de la consommation par les plus jeunes d'un gaz hilarant également appelé protoxyde d'azote.

Et comme le rapporte l'Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) dans une fiche publiée sur son site, entre 2017 et 2019, 66 intoxications à ce gaz ont été recensées dont la moitié chez des patients âgés de 20 à 25 ans. Outre des symptômes neurologiques et neuromusculaires, ces derniers souffraient également d'atteinte des nerfs des membres, de convulsions, de coma, voire d'arrêt cardio-respiratoire.

Si le protoxyde d’azote est soumis à certaines conditions de vente sous sa forme médicale, il est principalement utilisé pour son action analgésiante, il est également commercialisé comme gaz propulseur dans ces fameuses cartouches métalliques, notamment pour les siphons de crème chantilly. Et c'est d'ailleurs là que le bat-blêsse pour de nombreux élus qui ont décidé de se mobiliser afin de réglementer un peu plus sa vente, qui en raison d'un vide juridique est restée possible même pour les mineurs.

Conséquences sanitaires et écologiques

C'est le cas du maire de Cannes, le Républicain David Lisnard, qui vient de prendre deux arrêtés municipaux qui doivent réglementer, le temps d'un été, la vente de protoxyde d'azote. Ainsi, comme le rapporte 20 Minutes, les commerces auront pour interdiction de vendre ce gaz aux mineurs tandis que sa détention et consommation est désormais interdite en centre-ville et sur le littoral. Les contrevenants s'exposent à une amende de 38 euros. Ces arrêtés s'appuient sur les conclusions de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies.

"J’alerte à nouveau sur le danger sanitaire et le développement partout en France du protoxyde d’azote inhalé en gaz hilarant par notre jeunesse", expliquait-il sur Twitter.

Auprès de 20 Minutes, Yves Daros, directeur de la police municipale cannoise, soutient pleinement l'action de l'élu. "On se retrouve face à un vide juridique. En attendant une loi, le maire a préféré prendre les devants alors que nous voyons le phénomène se généraliser", ajoute-t-il.

Outre le volet sanitaire du dossier, David Lisnard a également tenu à prendre à bras-le-corps le problème écologique que pose cette consommation de plus en plus massive du gaz hilarant. Pour lui, cela a des conséquences graves sur "notre environnement par les déchets des cartouches de gaz et des ballons que nous trouvons en grand nombre dans les caniveaux", notait-il dans les colonnes de Nice-Matin en juin dernier.

Les interdictions se multiplient

Le maire de Cannes n'est d'ailleurs pas le seul a avoir souhaité agir contre le phénomène. Dès 2019, le maire de Nîmes, Jean-Paul Fournier, avait interdit la consommation sur le domaine public du protoxyde d'azote ainsi que la vente aux mineurs. Là encore, les contrevenants risquaient une contravention de 38 euros.

Même constat à Vernon, dans l'Eure, ou la mairie s'est appuyée sur des constats quotidiens "faits par la police municipale, les services sociaux, les services de la voirie et de la propreté urbaine" pour interdire fin juillet la vente de la substance aux moins de 18 ans.

A Viry-Chatillon dans l'Essonne, le même type d'arrêté a été pris à la mi-juillet. L'amende pour détention, consommation et vente de gaz hilarant aux mineurs s'élève à 68 euros. Auprès du quotidien Le Républicain de l'Essonne, la municipalité a justifié "une mesure symbolique qui peut au moins éviter que cela se propage."

"On a retrouvé pas mal de capsules près du lac ou dans certaines rues près de la nationale 7. Ce sont les agents de nettoyage qui ont constaté qu’il y en avait plus que d’habitude", alertait la mairie, dépeignant une situation désormais bien connue.

Des mesures qui semblent porter leurs fruits. A Aulnay-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, plus d'un an après l'interdiction de la vente aux mineurs, la municipalité a pu constater une baisse du phénomène dans la localité.

Le parlement se saisit du sossier

Fin 2019, le Sénat avait gravé dans le marbre l'interdiction de vente du protoxyde d'azote aux mineurs en votant à l'unanimité une proposition de loi transpartisane durcissant l'interdiction et les sanctions. Ainsi, le non-respect de cette interdiction est désormais assorti d'une amende de 3750 euros.

"Pour autant, nous devons être lucides, l'interdiction de vente aux mineurs ne permettra pas à elle seule de mettre fin aux pratiques de détournement d'usage de produits de consommation courante", estimait celui qui était alors secrétaire d'État auprès du ministre des Solidarités et de la Santé, Adrien Taquet.

Alors afin d'aller un peu plus loin dans la lutte contre la consommation du gaz, l'Anses propose de "réglementer l’accès et l’étiquetage du protoxyde d’azote pour son usage alimentaire" afin de compléter le projet de loi voté par la chambre haute.

L'agence conseille également d'améliorer "l’information des consommateurs et des professionnels de la jeunesse et de la santé pour prévenir les risques sanitaires" via l'intervention d'infirmières, de médecins scolaires, d'associations ainsi que par une communication ciblée dans les lieux de fêtes.

Article original publié sur BFMTV.com