En Arctique, les incendies se multiplient et contribuent au cercle vicieux du changement climatique

Le permafrost, comme ici en Sibérie, risque d’augmenter encore les émissions de CO2 avec la multiplication des incendies provoqués par le réchauffement climatique. Cercle vicieux.
Love Dalén Le permafrost, comme ici en Sibérie, risque d’augmenter encore les émissions de CO2 avec la multiplication des incendies provoqués par le réchauffement climatique. Cercle vicieux.

ENVIRONNEMENT - Un cycle infernal pour le climat. L’Arctique, déjà aux premières loges du réchauffement climatique, émet désormais plus de dioxyde de carbone (CO2) qu’elle n’en stocke, comme le dévoile ce mardi 10 décembre une étude américaine publiée par l’Agence d’observation atmosphérique et océanique américaine (NOAA). Cela à cause d’incendies de plus en plus nombreux, qui contribuent au réchauffement climatique après en avoir déjà été une conséquence directe.

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Ce nouveau rapport de référence met en exergue une source d’inquiétude majeure pour l’avenir de notre planète puisque la toundra arctique ne peut plus jouer « son rôle important dans le système climatique mondial », en tant qu’immense réservoir souterrain de carbone. La région, qui englobe le pôle Nord, est en effet victime du réchauffement climatique et de ses conséquences directes, avec la multiplication des incendies comme preuve directe d’une inversion problématique.

C’est ce qu’explique Rick Spinrad, le chef de l’agence américaine qui publie ce rapport. « La toundra arctique, qui connaît un réchauffement et une augmentation des feux de forêt, émet désormais plus de carbone qu’elle n’en stocke », affirme-t-il. De quoi accentuer un cercle vicieux très inquiétant, que l’on vous explique.

Un dégel accéléré

L’Arctique est en partie composée de toundra, un milieu écologique constitué d’une végétation rase et de permafrost, aussi appelé pergélisol. Un sol gelé qui contient le double de la quantité de CO2 présente dans l’atmosphère et le triple de ce qui a été émis par les activités humaines depuis 1850…

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Sauf que ces dernières décennies, sous l’effet du réchauffement climatique, les incendies de toundra n’ont cessé d’augmenter et ont même connu un record en 2023, note la NOAA. La saison des feux record au Canada en 2023 a par exemple conduit à l’émission de « près de 400 millions de tonnes de dioxyde de carbone », pointe Brendan Rogers, co-auteur du rapport. Soit « plus que les émissions annuelles de tous les autres pays, à l’exception de la Chine, des États-Unis, de l’Inde et de la Russie ».

En brûlant la végétation, ces feux libèrent du dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Mais ils altèrent aussi les couches isolantes du sol, accélérant le dégel à long terme du pergélisol, qui se traduit par des émissions supplémentaires de dioxyde de carbone et de méthane, deux des principaux gaz qui piègent la chaleur dans l’atmosphère.

En résumé, le réchauffement climatique provoque plus d’incendies. Ces mêmes incendies contribuent ensuite directement au réchauffement climatique puisqu’ils empêchent ce milieu écologique fragile d’absorber le CO2 en quantité suffisante. Pire encore : ce dernier est relâché en grande quantité dans l’atmosphère avec l’augmentation des feux de toundra.

Une amplification de « l’amplification »

Le fait que l’Arctique émette désormais plus de carbone qu’elle n’en stocke « aggravera les effets du changement climatique », prévient ainsi Rick Spinrad. « Un signe de plus, prédit par les scientifiques, des conséquences d’une réduction inadéquate de la pollution par les combustibles fossiles ».

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Sachant que l’année 2024 arrive à la deuxième place en termes d’émissions liées à des incendies survenus au nord du cercle polaire arctique, le rapport en profite pour mettre en valeur le phénomène dit d’« amplification » qui touche l’Arctique. En clair, cette partie du globe se réchauffe plus que les latitudes moyennes. Ce phénomène est dû à de nombreux facteurs, comme la perte de la couverture neigeuse et de la banquise, ou encore le réchauffement des océans. L’augmentation des températures a beau stimuler la productivité et la croissance des végétaux, elle provoque également le dégel du pergélisol.

Le rapport pointe donc un « signe avant-coureur alarmant » selon Brenda Ekwurzel, climatologue de l’ONG américaine Union of Concerned Scientists. Car « une fois atteints, nombre de ces seuils d’impacts négatifs sur les écosystèmes sont irréversibles », prévient-elle. « Les émissions du pergélisol ne vont pas surpasser les émissions liées aux combustibles fossiles, mais elles constituent une couche importante, et il faut donc en tenir compte », finit par souligner avec inquiétude Brendan Rogers.

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