Après les législatives, la semaine qui a sonné la Macronie

Emmanuel Macron photographié à Villepinte le 13 juin (illustration). (Photo: via Associated Press)
Emmanuel Macron photographié à Villepinte le 13 juin (illustration). (Photo: via Associated Press)

Emmanuel Macron photographié à Villepinte le 13 juin (illustration).  (Photo: via Associated Press)

POLITIQUE -  ”Ça fait peur, mais ça va être aussi intéressant. On ne va pas s’ennuyer”. Dimanche 19 juin, un pilier de la majorité réagit auprès du HuffPost à chaud aux résultats très décevants pour le parti présidentiel et ses alliés au second tour des élections législatives. Avec 245 sièges, la coalition Ensemble! est loin de la majorité absolue. Pire pour Emmanuel Macron, plusieurs figures de son mouvement sont rayées de la carte politique, à l’image de Christophe Castaner et Richard Ferrand, deux poids lourds proches du président.

Même chose pour plusieurs ministres de premier plan, à l’instar d’Amélie de Montchalin, en charge de la Transition écologique battue dans l’Essonne ou de sa collègue de la Santé, Brigitte Bourguignon, défaite dans le Nord. La conséquence d’un bug du logiciel macroniste, qui n’a pas su profiter de la réélection inédite du chef de l’État et qui a échoué à honorer l’une de ses promesses de 2017: cantonner l’extrême droite aux marges de la politique. Et pour cause, 89 députés du RN font leur entrée au Palais Bourbon, du jamais vu.

Comment faire pour gouverner?

Dès lors, la formation présidentielle, prise en étau entre la NUPES et le parti de Marine Le Pen à l’Assemblée nationale, entre dans une période de turbulences. Comment faire pour gouverner? Personne n’a la réponse car tout le monde semble naviguer à vue dans un navire macroniste déboussolé. Incapable d’ériger un front républicain durant l’entre-deux tours des législatives et privé du soutien des Républicains, la majorité se trouve désormais à envisager de collaborer avec le RN, quitte à participer à la normalisation tant recherchée par Marine Le Pen.

“Ce mouvement et ce personnel politique ne sont pas habitués aux revers sur le plan national”, décrypte en début de semaine un ancien conseiller parlementaire, reconverti dans le privé. Un marcheur historique surenchérit, alarmiste: “Je suis très choqué. C’est n’importe quoi. Ils perdent les pédales”. Conséquence immédiate de ce revers, la mise au placard du projet de Conseil national de la Refondation. L’Élysée a beau expliquer que le “report” de cette nouvelle instance censée incarner une “nouvelle méthode” de gouvernance n’est pas lié au crash des législatives, personne n’y croit. 

Mardi 21 juin, l’entourage du chef de l’État fait savoir qu’il a refusé la démission d’Élisabeth Borne, “afin que le gouvernement puisse demeurer à la tâche et agir en ces jours”. Dans la foulée, les représentants des différents partis d’opposition sont invités à l’Élysée pour discuter de la suite. Les discussions durent deux jours. Il en ressort quelques idées diffusées comme des ballons d’essais. Parmi elles, la formation d’un gouvernement d’union nationale, option refusée d’emblée par les oppositions. Le temps passe, et rien ne se passe, si ce n’est quelques impatiences exprimées dans la presse par des ténors macronistes.

Mercredi 22 juin, François Bayrou, proche d’Emmanuel Macron, dresse sur France inter le profil du Premier ministre idéal qu’exige à ses yeux la situation politique. Une conception à l’opposé du CV affiché par Elisabeth Borne, et qui sonne comme un coup de pression visant à remercier la cheffe du gouvernement, alors que l’opposition réclame bruyamment son scalp. Ce même jour, le RN fait une démonstration de force à l’Assemblée nationale et attire l’attention médiatique. Le défilé des chefs de partis terminé à l’Élysée, Emmanuel Macron décide de reprendre la main. 

“Il ne faut pas laisser le doute s’installer”

À 15h30, son entourage fait savoir qu’il s’exprimera le soir même à 20 heures ce qui, automatiquement, reléguera la victoire symbolique de Marine Le Pen au second plan. En costume bleu, Emmanuel Macron livre en guise de riposte une allocution de huit minutes qui laisse tout le monde sur sa faim. Il s’en remet aux oppositions, auxquelles il charge de “bâtir des compromis, des enrichissements, des amendements à ciel ouvert, en transparence”.

Une façon de jouer la montre alors qu’il doit enchaîner des impératifs diplomatiques qui l’éloignent de Paris. Là encore, les oppositions voient rouge et apprécient moyennement cet “ultimatum” adressé par un chef de l’État en position de faiblesse, car dépourvu de majorité absolue à l’Assemblée. Durant son discours, Emmanuel Macron n’a pas une seule fois mentionné Elisabeth Borne, pourtant impliquée au premier chef dans cette situation, fragilisant davantage sa Première ministre.

Surtout, en se laissant du champ, le chef de l’État prolonge la paralysie institutionnelle qui gène l’action du gouvernement et complique la rentrée des marcheurs à l’Assemblée nationale. Ce qui commence à irriter, y compris dans son propre camp. “Il ne faut pas perdre trop de temps avant d’être opérationnel. Il ne faut pas laisser le doute s’installer”, s’impatiente une cadre de la majorité.

Finalement, samedi 25 juin, dans un entretien à l’AFP, Emmanuel Macron a “confirmé” sa confiance à Elisabeth Borne. Celle-ci devra conduire de nouvelles consultations des groupes parlementaires afin de former un “gouvernement d’action” pour “début juillet”. Ce gouvernement pourra être rejoint par des représentants de forces politiques prêtes à coopérer avec la majorité.

“J’ai confiance dans notre capacité collective à y arriver. J’ai confiance dans la capacité de la Première ministre à les faire émerger. J’ai confiance dans l’esprit de responsabilité des forces de gouvernement”, assure le chef de l’État dans cette interview.

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Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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