Après le diagnostic d’une maladie génétique très rare, mon mari et moi affrontons la réalité d’un enfant malade

Illustration d'un bébé.
Steve Russell via Getty Images Illustration d'un bébé.

Steve Russell via Getty Images

Et c’est vers l’âge de cinq mois que nous nous rendons compte sur sa table à langer qu’elle a des mouvements oculaires anormaux. On filme ses yeux et on l’envoie à différents médecins autour de nous qui nous suggèrent très vite de consulter un neuropédiatre.

SANTÉ - Il y a trois ans, mon mari et moi étions insouciants, très amoureux et en bonne santé. Un mariage de rêve avec nos amis et famille proches vient de se terminer.

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Nous aimons notre vie parisienne, récemment propriétaires d’une maison dans une jolie banlieue, deux jobs qui nous plaisent, des voyages et projets plein la tête.

Une insouciance que j’envie terriblement aujourd’hui, mais que je comprends être tout à fait hors du monde…

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Nous avons tout de suite eu envie de fonder notre famille, et j’apprends que je suis enceinte au début de l’été 2020.

Une grossesse classique

Une grossesse presque parfaite, avec les éternels maux propres à chaque femme, mais dans l’ensemble tout va bien. Ce bébé sera le premier des deux côtés de la famille, tout le monde est fou de joie. Un bonheur si fort qu’il paraît aujourd’hui indécent.

Les trois échographies se déroulent sans relever aucune anomalie, les marqueurs de trisomie sont très rassurants, et encore une fois, nous sommes tous en bonne santé… Comment cela pourrait-il être autrement ?

Mon accouchement, en mars 2021, se passe très bien. Déclenché pour cause d’hypertension à 39 semaines de grossesse, il n’y a aucun risque selon les médecins donc nous attendons cette naissance sereinement. Après plus de 10 heures de travail, notre fille arrive au monde, 2,97 kg et 48 cm d’amour. 10/10 au test Apgar à sa naissance, aucun signe de difficulté.

Premières inquiétudes

Le séjour à la maternité n’est pas simple pour moi, un petit baby blues mais qui ne m’empêche pas déjà d’aimer cet enfant plus que tout. Avant la sortie de la maternité, parmi les différents tests de santé sur notre fille, le test auditif ne se déroule pas comme prévu. Les ondes n’ont pas l’air de faire réagir son cerveau mais la puéricultrice et le pédiatre ne s’en alarment pas pour autant : « On a souvent des défauts avec cet appareil. Retournez dans un cabinet auditif dans un mois pour vérifier mais ne vous inquiétez pas trop ».

Évidemment, nous sommes très inquiets mais au fil des jours, on se rend compte qu’elle réagit aux bruits autour d’elle, elle n’est donc pas sourde du tout.

Dans les premiers mois de sa vie, notre bébé pleure beaucoup, vraiment beaucoup. Sa pédiatre nous expliquera qu’il n’y a pas de raison particulière, les bébés pleurent ! Quelle entrée difficile dans la parentalité et aussi pour notre couple ! On a littéralement acheté toute la parapharmacie disponible concernant les coliques, constipation, reflux gastriques internes, et j’en passe… De longs mois sans presque sortir tant elle pouvait pleurer, pleurs d’une intensité et d’une durée improbables. Il y a aussi un élément difficile : notre fille refuse catégoriquement d’entrer dans un siège-auto ou une poussette. Des hurlements à n’en plus finir…

Avoir un enfant différent c’est un deuil permanent, l’acceptation un peu plus chaque jour que notre enfant n’ira peut-être jamais à l’école, ne cherchera pas les œufs de pâques dans le jardin, n’apprendra pas à lire l’heure, à jouer à cache-cache ou à faire du vélo. Et je crois que c’est bien là le plus difficile. Plus que l’annonce du diagnostic, c’est se rendre compte chaque jour de tout ce que la vie ne lui offrira pas, de tout ce qu’on avait imaginé et qui ne se fera pas…

Et c’est vers l’âge de cinq mois que nous nous rendons compte sur sa table à langer qu’elle a des mouvements oculaires anormaux. On filme ses yeux et on l’envoie à différents médecins autour de nous qui nous suggèrent très vite de consulter un neuropédiatre.

Le début d’une période de vie très douloureuse

En parallèle de ces premières investigations médicales, notre bébé cesse de s’alimenter normalement. On l’hospitalise donc au CHU de la ville. Recherche des causes des mouvements anormaux, de son hypotonie axiale, et de ses troubles alimentaires… Les médecins pensent à de l’épilepsie et lui donnent des traitements très forts. Si fort, qu’elle ne réagit plus du tout au monde autour d’elle, perd du poids à vue d’œil, et son état clinique est mauvais.

Je suis restée chaque nuit auprès d’elle, et son père me relayait en journée pour que je puisse me reposer. Mais comme chaque maman qui a connu un enfant hospitalisé, il est presque insurmontable de quitter l’enceinte de l’hôpital. Une fois où j’ai accepté de rentrer dormir une nuit chez moi, à bout de forces, et de laisser ma mère la garder, je me souviens être rentrée à la maison et m’être effondrée devant le berceau vide de ma fille. Et dire que quelques semaines auparavant, nous étions si heureux et si insouciants…

De cette période, je me souviendrai toujours de l’indélicatesse de certains médecins ou de la nonchalance dérangeante du personnel médical dans l’administration des traitements. Une pédiatre nous a même dit à l’arrivée de notre fille dans le service : « Vous voyez bien qu’elle ne vous ressemble pas cet enfant » car elle suspectait une maladie génétique. Quelle violence.

Au bout de quatre semaines d’examens au CHU, et devant l’incapacité de l’équipe médicale à trouver une piste, nous demandons une évacuation sanitaire vers l’hôpital Necker Enfants Malades à Paris. Notre enfant n’a presque plus aucun contact avec le monde autour d’elle et continue à perdre du poids.

Ont donc suivi dix jours d’hospitalisation dans le service de neuropédiatrie de l’hôpital Necker, où nous comprenons que notre fille ne fait pas d’épilepsie. Les médecins stoppent donc les antiépileptiques. Ça y est, notre bébé ouvre les yeux et sourit à nouveau ! Néanmoins, après une batterie d’examens et beaucoup de professionnalisme, les pédiatres du service ne trouvent pas la cause des symptômes de notre fille. Pour autant, ils nous confirment qu’elle a une maladie grave, certainement d’origine génétique et très rare.

Nous rentrons sans diagnostic, c’est difficile mais cela permet tout de même de l’espoir : « Le pire n’est jamais certain ».

À cette période, les difficultés du quotidien seront toutes bouleversantes, difficiles, parfois insurmontables. Notre petite fille a arraché sa sonde gastrique toutes les semaines pendant des mois, qu’il a fallu reposer par des infirmières pas toujours disponibles et surtout en affrontant les hurlements désespérés de notre bébé qui ne comprend pas pourquoi on lui inflige tant de douleur… Puis les innombrables passages aux urgences pédiatriques, les vomissements, et symptômes inquiétants, …

En fin d’année, je tombe enceinte à nouveau, et grâce à cette nouvelle grossesse, nous avons la chance d’avoir le droit à une étude génétique pour notre fille en urgence, afin d’identifier sa maladie et si possible de la rechercher sur le fœtus du deuxième bébé. Il n’y a pas de garantie, mais les équipes de génétiques d’un institut veulent essayer.

Nouvelle grossesse et diagnostic

6 semaines plus tard, nous sommes reçus par la chef de clinique. C’était le 13 janvier 2022.

Elle a bien une mutation génétique rare. Si rare que les médecins ne connaissent que 7 cas identifiés dans le monde à ce jour. Le diagnostic est extrêmement brutal et lourd : les médecins ne savent pas si notre fille pourra marcher ou parler, elle aura des troubles de la vision, de l’épilepsie, et souffrira de troubles alimentaires et du sommeil. Bien qu’annoncé avec autant de douceur que possible, nous étions à des années-lumière de nous attendre à un tel diagnostic en nous levant le matin.

Suivront des larmes, des cris d’incompréhension, de désespoir… Des nuits entières sans fermer l’œil à pleurer tous les deux dans le salon.

Avoir un enfant différent c’est un deuil permanent, l’acceptation un peu plus chaque jour que notre enfant n’ira peut-être jamais à l’école, ne cherchera pas les œufs de pâques dans le jardin, n’apprendra pas à lire l’heure, à jouer à cache-cache ou à faire du vélo. Et je crois que c’est bien là le plus difficile. Plus que l’annonce du diagnostic, c’est se rendre compte chaque jour de tout ce que la vie ne lui offrira pas, de tout ce qu’on avait imaginé et qui ne se fera pas…

Quelle belle leçon de vie pour moi qui planifie tout depuis toujours ! La vie nous a rappelé que c’est elle qui décide…

Une leçon de vie et le deuil d’un enfant en bonne santé

Aujourd’hui, notre fille se stabilise, et nous connaissons mieux sa maladie et ses symptômes. Un groupe privé sur les réseaux sociaux nous a permis de rencontrer les parents de 47 enfants dans le monde atteints de la même maladie et d’échanger. Nous apprenons à gérer les crises d’irritabilité, prendre du recul, ne pas être bouleversé à chaque nouvelle étape. Nous lui donnons moins de médicaments aussi car pas toujours efficaces. Et surtout nous profitons d’elle à chaque moment de quiétude. J’aime la voir blottie dans les bras de son papa, en sécurité. Elle fait du mieux qu’elle peut, rien n’est de sa faute et notre rôle c’est de la couvrir d’amour et de s’assurer de son bien-être sans trop anticiper l’avenir. Chaque moment se gérera en temps voulu.

Quand elle a été hospitalisée à l’hôpital Necker, j’ai passé beaucoup de temps à chercher des témoignages de parents ayant vécu des situations similaires à la nôtre. Les histoires lues en ligne m’ont beaucoup apporté, elles m’ont permis de comprendre, de pleurer, probablement d’accepter aussi… Et c’est à cet instant que je me suis promis de prendre le temps d’écrire notre histoire également, qui je l’espère aidera d’autres familles qui traversent cette situation.

Chaque jour, en France, 56 bébés naissent d’une maladie génétique.

Alors, aux parents qui viennent d’apprendre que leur enfant est malade ou porteur de handicap : Même si cela paraît insurmontable, soyez patients. Indulgents. Laissez le temps faire. Au fil des mois, vous apprendrez à mieux connaître cet enfant, à l’aimer, à en être très fiers. Accrochez-vous aux espoirs, tout en essayant doucement d’accepter les choses.

Qui sait comment la situation évoluera, la vie est tellement pleine de surprises…

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