Après la chute du drone américain Reaper, les États-Unis et la Russie se sont parlé

Un drone de type MQ-9 Reaper survolant une zone aérienne américaine en janvier 2020.
Un drone de type MQ-9 Reaper survolant une zone aérienne américaine en janvier 2020.

INTERNATIONAL - L’heure est visiblement au dialogue au plus fort des tensions. À l’initiative des États-Unis, les ministres de la Défense russe et américain, Sergueï Choïgou et Lloyd Austin, se sont entretenus par téléphone ce mercredi 15 mars, au lendemain de l’interception d’un drone américain au-dessus de la mer Noire par des avions russes.

« Le 15 mars, le ministre russe de la Défense, le général d’armée Sergueï Choïgou, et le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin se sont entretenus par téléphone à l’initiative de la partie américaine », a indiqué le ministère russe de la Défense.

La Russie a donc bel et bien confirmé l’existence de cette entrevue téléphonique, sans toutefois réagir dans un premier temps, avant de pointer du doigt l’espionnage des américain comme source de l’incident en mer Noire. À l’inverse, les États-Unis n’ont pas manqué de réaffirmer sans attendre leur volonté de garder un dialogue constant avec Moscou, sans détailler le contenu de l’échange téléphonique.

Lloyd Austin a plutôt rappelé que son pays prenait « tout potentiel d’escalade très au sérieux », d’où l’importance d’échanger avec son homologue russe, malgré un contexte tendu et exacerbé depuis plus d’un an par la guerre en Ukraine. De quoi faire écho aux paroles prononcées la veille par le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, à la télévision russe : « Tout incident provoquant des tensions entre les deux grandes puissances nucléaires est chargé de risques très importants pour la sécurité globale ».

La Russie doit voler de « manière professionnelle »

Suite à cet appel, le ministre américain de la Défense en a profité pour affirmer que les États-Unis continueraient à voler « là où le permet le droit international », peu de temps après avoir échangé avec Sergueï Choïgou.

« Je viens de parler au téléphone avec mon homologue russe, le ministre (Sergueï) Choïgou. Comme je l’ai dit à plusieurs reprises, il est important que les grandes puissances soient des modèles de transparence et de communication », a insisté Lloyd Austin lors d’une conférence de presse. « Et les États-Unis vont continuer à voler (...) là où le permet le droit international. Et il incombe à la Russie de faire voler ses avions militaires de manière professionnelle et sûre », a-t-il averti.

Le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin et le général Mark Milley lors d’une conférence de presse au Pentagone, faisant suite à un appel avec Moscou pour évoquer l’abattage d’un drone américain MQ-9 Reaper dans la mer Noire par des avions de chasse russes.
Le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin et le général Mark Milley lors d’une conférence de presse au Pentagone, faisant suite à un appel avec Moscou pour évoquer l’abattage d’un drone américain MQ-9 Reaper dans la mer Noire par des avions de chasse russes.

« Et c’est pour cela que je pense qu’il est important de garder les canaux de communication ouverts. Je pense qu’il est réellement crucial que nous puissions prendre le téléphone et parler. Et je pense que cela aidera à prévenir une erreur de calcul à l’avenir », a-t-il ajouté.

Par ailleurs, le chef d’état-major américain, le général Mark Milley, a dit que Washington allait examiner les données du drone pour établir les faits exacts, et que lui-même avait l’intention de parler à son homologue russe Valery Gerasimov. « Nous avons un appel de prévu, voyons si cela se fait », a-t-il affirmé lors de cette même conférence de presse.

« Était-ce délibéré ou non ? Je ne sais pas encore. Nous savons que l’interception était délibérée. Nous savons que le comportement agressif était délibéré, nous savons aussi que ce n’était pas professionnel et que c’était dangereux », a-t-il dénoncé. Quant au contact physique entre les appareils, il « reste à voir » si c’était délibéré ou non, a-t-il ajouté.

L’espionnage américain en cause selon Moscou

Finalement, Moscou s’est également exprimé ce mercredi soir, suite à l’échange téléphonique. Et sans surprise, le Kremlin a rejeté la faute sur Washington, estimant que la collecte de renseignements par les Américains a conduit à l’incident.

Le ministre russe de la Défense a affirmé lors de cet appel avec son homologue américain que le « renforcement » des opérations d’espionnage menées par les États-Unis était l’une des causes de l’incident. « Les causes de l’incident sont la non-observation par les États-Unis de la zone de limitation des vols (...) du fait de la conduite de l’opération militaire spéciale (en Ukraine), ainsi que le renforcement des activités de renseignement contre les intérêts de la Russie », a indiqué Sergueï Choïgou, cité dans un communiqué du ministère russe de la Défense, en assurant que Moscou « réagira proportionnellement » à de futures « provocations » américaines.

La Russie avait précédemment annoncé ce mercredi vouloir repêcher le drone américain qu’elle est accusée d’avoir fait s’abîmer en mer Noire mais qui prouve selon elle l’implication des États-Unis dans le conflit en Ukraine.

Le drone Reaper MQ-9 est tombé dans les eaux internationales après avoir été percuté, selon Washington, par un chasseur russe. Mais si Moscou admet l’interception de l’appareil par ses avions de chasse, elle dément tout contact qui aurait mené au crash. La Russie argue que le drone était entré, au large de la péninsule de Crimée annexée en 2014, dans une zone d’exclusion aérienne qu’elle a elle-même décrétée pour son opération en Ukraine.

Des éléments qui laissent d’ailleurs penser à l’Ukraine que la Russie cherche à « étendre » la guerre en Ukraine à d’autres parties. « L’incident avec le drone américain MQ-9 Reaper provoqué par la Russie en mer Noire est un signal de (Vladimir) Poutine qu’il est prêt à étendre la zone du conflit et à y impliquer d’autres parties », avait fait savoir sur Twitter le secrétaire du Conseil de sécurité ukrainien, Oleksiï Danilov.

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