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En appel dans l’affaire Bygmalion, Nicolas Sarkozy ne change qu’une seule chose à sa défense

Nicolas Sarkozy photographié ce mercredi 8 novembre à Paris à son arrivée à la XVIIe chambre correctionnelle du Palais de Justice de Paris.
THOMAS SAMSON / AFP Nicolas Sarkozy photographié ce mercredi 8 novembre à Paris à son arrivée à la XVIIe chambre correctionnelle du Palais de Justice de Paris.

POLITIQUE - « Si on le joue, c’est que c’est jouable ». Au moment où la Cour d’appel se retire pour une suspension de séance et délibérer sur « l’extinction de l’action publique » demandée par la défense de Nicolas Sarkozy, l’entourage de l’ancien président de la République, de retour devant la justice ce mercredi 8 novembre dans l’affaire Bygmalion, se montre confiant. « On sent qu’il y a un truc, ce n’est pas une manœuvre dilatoire visant à faire traîner les débats, on y croit vraiment », souffle au HuffPost un membre de sa garde rapprochée.

Pendant ce temps, quelques pas derrière, Nicolas Sarkozy en profite pour enfiler des biscuits au chocolat : une version bio des Petits Écoliers. Après 2 h 30 d’audience, l’ambiance est plutôt détendue dans la salle Dario du Palais de Justice de Paris. Beaucoup moins électrique qu’en première instance. Une soixantaine de journalistes sont accrédités pour ce procès en appel. Quasiment trois fois moins qu’en mars 2021, où 150 journalistes s’étaient manifestés pour suivre le procès dans lequel il était poursuivi pour « financement illégal de campagne électorale » et pour lequel il a été condamné en première instance à un de prison ferme.

Costume gris et sourires crispés

À croire que la presse s’habitue à voir un ancien président de la République comparaître dans un tribunal. À cinq minutes de l’ouverture du procès en appel, les bancs des journalistes sont clairsemés. Pourtant, à la différence de la fois précédente, l’ex-chef de l’État ne s’est fait pas représenter pour les audiences dites « procédurales ». Dans un brillant costume gris, le prévenu est arrivé quelques minutes avant le début des hostilités. Et compte bien être plus présent que lors de son procès en première instance en 2021 où il n’avait passé qu’une journée.

Sous le bras, des éléments du dossier ornés d’annotations manuscrites, lovés dans une pochette souple de couleur bleue. Les sourires brisent épisodiquement sa mine crispée. Un bonjour glacial à Jérôme Lavrilleux, et des checks du poing aux membres de son entourage finissent d’occuper son impatience.

L’audience commence. La présidente, Pascaline Chamboncel-Saligue, passe en revue les versions des quinze prévenus cités ce mercredi, et les différentes fraudes constatées durant l’instruction, et en première instance. Pendant ce temps, Nicolas Sarkozy écoute religieusement. Parfois il acquiesce en hochant la tête, comme un étudiant qui n’en perdrait pas une miette. Histoire que tout le monde comprenne ce dossier tentaculaire, comportant un volet pénal et un volet civil, la magistrate a fait distribuer une frise chronologique en format A3.

« Vous avez tout à fait raison madame la présidente »

S’exprimant d’un ton parfois léger, Pascaline Chamboncel-Saligue n’en est pas moins minutieuse sur la procédure et la tenue des débats. Même les rayons de soleil qui transpercent le palais de Justice ont fait l’objet d’une discussion préalable, précise-t-elle, alors qu’une lumière éblouissait une partie de la salle. Une application qui concerne aussi la façon dont elle s’adresse aux prévenus. « Comme je n’appelle pas M. Lambert “M. le Préfet”, je ne vous appelle pas “M. Le Président”, M. Sarkozy. J’espère que vous comprenez ». Nicolas Sarkozy ne résiste pas à la tentation de faire un bon mot : « Vous avez tout à fait raison. Merci madame la présidente ». Effet immédiat dans l’assistance, qui glousse.

Arrive alors le moment où son jeune avocat, Me Vincent Desry, entre en scène. Après avoir souligné que « Nicolas Sarkozy ne savait pas qu’une fraude avait été mise en place pour minorer les comptes de campagne », il plaide « l’extinction de l’action publique », c’est-à-dire l’arrêt des poursuites visant son client. Et ce, au nom de « l’autorité de la chose jugée », fait valoir l’avocat, qui affirme que Nicolas Sarkozy ne peut pas être jugé pour des faits pour lesquels le Conseil constitutionnel l’a déjà sanctionné en 2013 : le dépassement du plafond légal des dépenses de campagne. Il en va de « l’ordre de public », et même du « respect de l’État de droit » et de la Constitution. Un « argument de droit imparable », insiste-t-il.

Dans cette longue plaidoirie, Vincent Desry multiplie les arguments qui devraient, selon lui, conduire la Cour à prononcer « l’extinction de l’action publique », allant jusqu’à convoquer un amendement porté en 2000 par Arnaud Montebourg, alors député socialiste, sur le sujet. Or, il a fallu vingt minutes de délibération aux magistrats pour rejeter cette demande. C’est donc raté, l’audience reprend de plus belle. Et c’est bien sur sa campagne « en or massif », pour reprendre l’expression de la procureure en première instance, qui a coûté près du double du plafond autorisé, que Nicolas Sarkozy devra s’expliquer. Son audition est prévue le jeudi 23 novembre.

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