Antoine Dupont blessé: qui prend la décision de faire rejouer un joueur?
Depuis une semaine, la question brûle toutes les lèvres mais reste sans réponse. Sorti touché au visage en début de seconde période contre la Namibie (96-0), le capitaine du XV de France Antoine Dupont rejouera-t-il d’ici la fin de la Coupe du monde de rugby? Alors que les acteurs du rugby ne sont pas tous d’accord pour précipiter son retour, la décision émanera du staff médical ou de son chirurgien, comme l'a confirmé le président de la FFR Florian Grill.
"Je veux dire et redire ce que le staff répète depuis le début: c’est le chirurgien (le professeur Frédéric Lauwers à Toulouse, ndlr) qui dira si oui ou non Antoine Dupont peut jouer, assurait-il dans les colonnes du Parisien. Il faut faire confiance aux spécialistes et il n’y a pas meilleur spécialiste que la personne qui l’a opéré (…) Le chirurgien qui a opéré Antoine est un grand spécialiste du sujet et aura le dernier mot".
"L'entraîneur n'a rien à dire"
Jacques Giordan, le médecin du MHR, estime aussi que le dernier mot revient au corps médical, et plus particulièrement au spécialiste qui s'est occupé de son cas. "Pour un problème de santé pur, c’est le médecin du club qui prend la décision de faire rejouer le joueur, confirme-t-il. Et si ce n’est pas le médecin, c’est le spécialiste qui l’aura opéré. Là dans le cas Dupont, ça serait le chirurgien maxillo-facial. L’entraîneur, lui, n’a rien à dire".
Un constat partagé par le médecin du LOU, Jean-Philippe Hager, qui estime que le staff technique ou le joueur ne peuvent pas prendre seuls la décision. "Pour moi, il n’y a aucun doute, c’est la responsabilité du médecin référent et de l’équipe médicale, abonde-t-il. C’est eux qui vont donner le feu vert pour jouer. En aucun cas, le staff ou le président ne peut influer sur la décision. C’est notre responsabilité. Mais ça arrive tous les jours d’avoir des joueurs pressés de reprendre. Il faut leur expliquer les choses. On peut être amené à prendre un risque ensemble, entre guillemets, et donc reprendre un peu plus tôt mais en expliquant les risques. Mais ça ne doit jamais aller contre l’avis du médecin".
"Si on écoutait Yacouba Camara, qui est blessé, ça ferait deux mois qu’il jouerait"
Une bonne communication entre le blessé et son équipe médicale est donc essentielle, comme l’indique aussi Giordan. Sous peine de prendre des risques physiques, mais aussi judiciaires, en cas de nouveau pépin. "Ça dépend aussi de la personnalité du médecin, note-t-il. Moi, ça fait 30 ans que je suis médecin au club, 20 ans en équipe de France, on ne me la fait pas. Mais s’il y a un médecin un peu influençable… Par exemple, Yacouba Camara, qui est blessé, si on l’écoutait, ça ferait deux mois qu’il jouerait. Mais notre intérêt est de protéger les joueurs. Sur le plan médico-légal, s’il y a une complication, c’est la responsabilité du médecin. Par exemple, pour une commotion, si le médecin donne son feu vert alors que le joueur est encore en commotion, c’est le médecin qui va au tribunal".
Des propos appuyés par Hager. "Il peut y avoir une discussion en mode: ‘tu n’es pas complètement cicatrisé, consolidé, est-ce que tu as compris le risque?, propose-t-il. Le match vaut vraiment la peine de prendre ce risque?’. Dans le cas Dupont, c’est le médecin responsable du XV de France qui va étayer son diagnostic avec le spécialiste".
Grill rappelle qu’aligner le joueur contre l’Italie, la semaine prochaine pour le dernier match de poule, ne serait pas forcément judicieux compte tenu de l’écart qui sépare les deux nations et de la suite de la compétition qui se profile. "Ce n’est pas à Antoine Dupont de décider tout seul, pas au sélectionneur non plus, même si Fabien Galthié décidera si cela a du sens sportivement ou pas de l’aligner", rappelle le président.
Avec ou sans masque?
La réponse finale devrait donc sortir de la bouche des spécialistes, alors qu’un autre débat a récemment fait irruption autour du capitaine français: le port ou non d’un masque. Avec une réponse similaire, selon Florian Grill. "La décision appartient au médecin, répète-t-il. De ce que je comprends dans le cas d’Antoine, le masque ne changerait pas grand-chose, hormis peut-être psychologiquement s’il avait envie de le porter". Avec ou sans masque, la présence d’Antoine Dupont pour un probable quart de finale, le 14 ou 15 octobre, serait en tout cas une excellente nouvelle pour le XV de France. À condition qu’elle ne mette pas en péril la santé du joueur, donc.