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Amnesty dénonce les abus commis contre les travailleurs au Qatar

DOHA (Reuters) - L'exploitation des travailleurs étrangers reste d'actualité au Qatar, regrette Amnesty International dans un communiqué publié mardi, cinq ans après l'obtention par l'émirat de l'organisation de la Coupe du monde de football de 2022. L'ONG souligne que la règle qatarie de la "kafala", un système de parrainage des salariés qui concerne 94% de la main d'oeuvre locale, met les travailleurs étrangers à la merci de leurs employeurs et estime que les modifications apportées à la législation du travail relèvent du "rafistolage". Le ministère qatari du Travail a refusé de s'exprimer sur le contenu du communiqué tandis qu'un responsable fustigeait un texte qui vise selon lui à discréditer le Qatar à l'étranger. L'émirat, qui veut se servir de la Coupe du monde 2022 pour promouvoir son image, nie toute exploitation de salariés et dit avoir adopté plusieurs réformes du droit du travail. L'une d'entre elles prévoit par exemple que les salariés soient rémunérés par virement électronique. Elle est entrée en vigueur en novembre après sa promulgation par l'émir Tamim ben Hamad al Thani et permet aux salariés étrangers de saisir une commission gouvernementale si leur employeur ne leur accorde pas de permis de quitter le territoire. Mais, selon les militants et organisations de défense des droits de l'homme, les réformes gouvernementales ne vont pas assez loin puisque les salariés restent tenus d'obtenir de leur employeur l'autorisation de changer de travail ou de quitter le pays. "Avec le système de la kafala, il est trop facile pour un employeur peu scrupuleux de verser les salaires tardivement sans avoir à s'en soucier, d'héberger les salariés dans des logements sordides et exigus ou de proférer des menaces à l'encontre de ceux qui se plaignent de leurs conditions de vie", déclare Moustafa Kadri, spécialiste de la question des migrants dans le Golfe à Amnesty. "C'est pour cela que la kafala doit être réformée en profondeur et non pas rafistolée", dit-il. Les quelque 200 milliards de dollars (189 milliards d'euros) d'investissements projetés en amont de la Coupe du monde ont attiré des centaines de milliers de salariés étrangers, majoritairement indiens, népalais et bangladais, chargés de d'alimenter l'essor du secteur immobilier qatari. Le 21 novembre, la police a été appelée pour briser une grève de salariés travaillant sur un projet immobilier situé dans le centre de Doha, capitale de l'émirat, et dont les salaires n'avaient pas été versés. Selon l'ambassade indienne au Qatar, près de 260 migrants originaires d'Inde sont morts dans l'émirat depuis le début de l'année. Ces chiffres couvrent tous les décès et pas seulement ceux qui sont liées aux conditions de travail. (Tom Finn,; Nicolas Delame pour le service français)