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Allergies : pauvre microbiote !

Notre tractus digestif abrite 10 fois plus de bactéries que le nombre de cellules présentes dans le corps humain. ©Phovoir
Notre tractus digestif abrite 10 fois plus de bactéries que le nombre de cellules présentes dans le corps humain. ©Phovoir

Notre tractus digestif abrite 10 fois plus de bactéries que le nombre de cellules présentes dans le corps humain. ©Phovoir

La bonne santé de notre intestin est fondamentale pour assurer le fonctionnement de notre système immunitaire. Les médecins en sont aujourd’hui convaincus. Or lorsqu’une allergie se déclenche, c’est bien le système de défense de notre organisme qui réagit à tort. Un appauvrissement de notre microbiote intestinal est peut-être une des causes de la hausse de l’incidence des allergies. Explications.

Dès la naissance et au cours des 2 ou 3 premières années de vie, notre microbiote intestinal personnel se met en place. Très concrètement, notre intestin est progressivement colonisé par des milliards et des milliards de bactéries. « La biodiversité bactérienne dans l’intestin a été estimée à environ 1 200 espèces bactériennes », précise le Dr Stéphane Hazebrouck de l’INRA.

Il s’agit là d’un phénomène naturel et nécessaire. Pour permettre cette colonisation, « des mécanismes de tolérance se mettent en place qui évitent des réactions immunitaires face à toutes ces bactéries », explique le Pr Antoine Magnan, chef du service de pneumologie du CHU de Nantes et président du Congrès francophone d’Allergologie (CFA).

Mauvais mode de vie

Or « lorsque cette colonisation ne se fait pas de façon optimale, du fait des nombreux changements survenus dans notre environnement et notre mode de vie depuis 50 ans, le système immunitaire répond à des antigènes qui normalement ne devraient pas induire de réponse », poursuit-il. Comme par exemple les allergènes, alimentaires mais aussi respiratoires. C’est bien ce qui semble se produire de plus en plus souvent dans les pays développés. « Notre microbiote est modifié, appauvri en nombre d’espèces de bactéries présentes », précise le Pr Magnan. Par conséquent « il est maintenant fortement suggéré que ces modifications sont associées au développement des maladies allergiques », note le Dr Hazebrouck.

Ce sont en grande partie les changements de notre régime alimentaire, la conservation des aliments, la pollution, l’utilisation des antibiotiques, de meilleures conditions d’hygiène, le tabagisme et le stress qui sont incriminés pour expliquer le développement des allergies. Pour preuve, « une faible diversité du microbiote intestinal a été rapportée chez des enfants qui ont ensuite développé une dermatite atopique ou un asthme », explique-t-il.

Que faire pour y remédier ?

Des études sont en cours pour évaluer la possibilité d’administrer des prébiotiques ou des probiotiques, c’est-à-dire des « bonnes » bactéries pour l’intestin, sous forme de compléments alimentaires. Objectif, rééquilibrer une flore intestinale appauvrie. Mais « pour le moment on ne peut recommander aucune stratégie puisqu’on ne sait pas à quel âge, quelle dose et pendant combien de temps les donner », indique le Pr Magnan. « S’il y a des éléments de preuve chez certains sous groupes, il est donc difficile de prôner l’utilisation des probiotiques dans la population générale pour lutter contre les allergies. »

Il est toutefois utile, en matière de prévention, de suivre quelques conseils simples : « privilégiez la diversité alimentaire et ne stérilisez pas à outrance », souligne le Pr Magnan. « Il faut avoir une attitude modérée vis-à-vis de tout. » Exemple important : la stérilisation des biberons n’est plus recommandée systématiquement pour les nourrissons en bonne santé. Antoine Magnan se demande d’ailleurs « comment on n’y pas pensé plus tôt, avec tout ce que les petits portent à leur bouche ! »