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Allemagne: Une coalition ou de nouvelles élections, avertit le SPD

Pas un seul social-démocrate allemand n'est euphorique à l'idée de négocier une nouvelle "grande coalition" avec les conservateurs mais le rejet de ce scénario entraînera inévitablement de nouvelles élections, a averti mercredi le secrétaire général du SPD, Lars Klingbeil (photo). /Photo prise le 8 décembre 2017/REUTERS/Hannibal Hanschke

par Michelle Martin

BERLIN (Reuters) - Pas un seul social-démocrate allemand n'est euphorique à l'idée de négocier une nouvelle "grande coalition" avec les conservateurs mais le rejet de ce scénario entraînera inévitablement de nouvelles élections, a averti mercredi le secrétaire général du SPD, Lars Klingbeil.

"Avant de voter au congrès du parti (dimanche), les délégués du SPD doivent être conscients qu'il n'y a que deux scénarios réalistes: des négociations formelles (sur une coalition) ou alors de nouvelles élections", a-t-il déclaré sur le site internet du journal Die Zeit.

Lars Klingbeil a dit cependant comprendre le "profond scepticisme" de nombreux militants du Parti social-démocrate.

Son chef de file, Martin Schulz, a toutefois fait état d'avancées dans le processus et s'est dit encouragé par le résultat d'une réunion organisée en Bavière avec des militants du SPD.

"L'état d'esprit était excellent", a-t-il déclaré à la presse, tout en faisant état de discussions animées. Il dit avoir recuelli un large soutien en faveur de la feuille de route sur laquelle il s'est accordé avec la CDU.

De nouvelles élections pourraient renforcer le parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD), qui a fait une entrée en force au parlement en septembre après une campagne anti-immigration.

S'exprimant lors d'une conférence de presse à Berlin, Angela Merkel a souligné à la mi-journée que l'Allemagne avait besoin d'un gouvernement stable et qu'elle "comptait" sur les délégués du SPD pour qu'"ils prennent une décision responsable" en acceptant d'ouvrir des négociations formelles avec son bloc CDU-CSU.

"Je ne veux pas me mêler de cela", a cependant ajouté la chancelière.

Selon le dernier sondage INSA, le SPD recueillerait seulement 18,5% des voix en cas de nouvelles élections, deux points de moins que lors des élections législatives du 24 septembre dernier, ce qui était déjà son pire résultat depuis 1949.

Pour Edgar Franke, porte-parole du "Seeheimer Kreis", l'aile droite du SPD, le parti risque de tomber à 15 ou 16% des intentions de vote s'il refuse de s'associer à une nouvelle coalition. "Dans ce cas, il lui faudra de longues années pour se remettre", a-t-il dit au magazine Focus.

Les fédérations SPD de Berlin et de Saxe-Anhalt se sont pourtant prononcées contre des négociations avec les conservateurs de l'Union chrétienne-démocrate (CDU) de la chancelière Angela Merkel et de l'Union chrétienne-sociale (CSU) bavaroise.

Les jeunes du SPD, les "Jusos", sont également opposés à une nouvelle coalition et leur chef Kevin Kühnert fait campagne à travers le pays pour le "non".

"GRANDE MÉFIANCE"

Les fédérations du Brandebourg et de Hambourg semblent au contraire favorables aux négociations, tout comme les syndicats et les maires SPD de douze grandes villes.

Le numéro un du SPD, Martin Schulz, ancien président du parlement européen, tente de convaincre la fédération de Rhénanie du Nord-Westphalie - qui représente plus du quart des 600 délégués du prochain congrès - de soutenir les négociations.

Norbert Römer, chef du groupe parlementaire social-démocrate dans ce Land, a toutefois déploré que le document de travail issu des "discussions exploratoires" de la semaine dernière ne laisse pas suffisamment espérer un "nouveau départ".

Il a demandé aux conservateurs de cesser leurs "provocations". "Dans notre parti, et cela vaut aussi pour moi, il y a une grande méfiance envers Mme Merkel et ses troupes", a-t-il dit.

Le SPD doit faire approuver par ses délégués lors d'un congrès extraordinaire dimanche l'accord sur l'ouverture de négociations formelles avec le bloc CDU/CSU.

Mais même si le "oui" l'emporte au congrès, il faudra encore obtenir l'approbation de la majorité des 443.000 membres du parti, comme l'a promis Martin Schulz.

Une "grande coalition" conservateurs-SPD a déjà fonctionné en Allemagne lors des législatures 2005-2009 et 2013-2017.

Les élections législatives du 24 septembre ont été marquées par une forte baisse de la CDU tandis que le SPD réalisait son pire résultat de l'après-guerre, à tel point que Martin Schulz avait dans un premier temps exclu tout nouvel accord avec les conservateurs afin que le parti "se refasse une santé" dans l'opposition.

Il s'était ravisé, notamment sous la pression du président fédéral Frank-Walter Steinmeier, après l'échec des négociations entre la CDU/CSU, les libéraux et les Verts.

(Guy Kerivel pour le service français)