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Algérie : les (sobres) funérailles de l'ex-président Abdelaziz Bouteflika

L'ex-président algérien Abdelaziz Bouteflika a été inhumé ce dimanche au carré des martyrs du cimetière d'El Alia à Alger, réservé aux héros de la guerre d'indépendance, mais il a eu droit à bien moins d'honneurs que ses prédécesseurs.

L'ancien président algérien, Abdelaziz Bouteflika, mort vendredi, a été inhumé ce dimanche à Alger.

Le cortège funèbre est arrivé au cimetière d'El Alia, après avoir parcouru une trentaine de km depuis Zeralda, commune de l'ouest d'Alger, où il s'est éteint à l'âge de 84 ans. La dépouille a été portée sur un affût de canon tiré par un véhicule blindé couvert de fleurs.

Aux côtés de membres de la famille, le président Abdelmadjid Tebboune, qui fut Premier ministre sous Bouteflika, les ministres et des diplomates étrangers étaient présents au cimetière, selon les médias.

La dépouille d'Abdelaziz Bouteflika a été mise en terre au carré des Martyrs où reposent ses prédécesseurs, aux côtés des figures de la guerre d'indépendance (1954-1962).

Beaucoup moins de faste pour Bouteflika

Tous les anciens chefs d'Etat avaient eu droit à des funérailles solennelles et huit jours de deuil national, à l'instar du premier président de l'Algérie indépendante Ahmed Ben Bella (1963-1965) et du troisième chef d'Etat Chadli Bendjedid (1979-1992), tous deux décédés en 2012.

Sans parler des funérailles grandioses du mentor de Bouteflika, l'ex-président Houari Boumedienne (1965-1978), marquées en 1978 par le tir de cent coups de canon et qui rassemblèrent des centaines de milliers de personnes.

Mais là, pour Abdelaziz Bouteflika, les autorités ont plutôt fait profil bas. Il faut dire que l'ex-président a été chassé du pouvoir en 2019, contesté par la rue et lâché par l'armée.

Signe d'un certain embarras officiel, l'exposition de la dépouille initialement prévue pour un hommage des dignitaires et du grand public au Palais du peuple d'Alger, a été annulée, selon des sources concordantes.

Au terme de plusieurs heures de flottement sans réaction officielle, M. Tebboune, au pouvoir depuis fin 2019, avait fini par décréter samedi la mise en berne du drapeau national et un deuil de trois jours pour honorer "le moudjahid Abdelaziz Bouteflika".

"La mort d'un simple quidam" ?

Ces atermoiements illustrent, selon les observateurs, des craintes de manifestations hostiles contre un ex-président à l'image ternie.

"Franchement, j'ai mieux à faire que de m'intéresser aux obsèques d'un président qui a laissé le pays dans un état lamentable. Je préfère m'occuper de mes oiseaux", a déclaré dimanche à l'AFP Farès, 62 ans, un retraité des finances qui habite à Alger.

Pour Islam, 45 ans, postier dans la capitale, "cet enterrement est un non-événement. Autour de moi, personne n'en parle en tout cas. C'est comme s'il s'agissait de la mort d'un simple quidam, qui n'a jamais été président. Les Algériens donnent l'impression d'avoir oublié Bouteflika, d'avoir tourné la page de son règne".

Bouteflika, une présidence de 20 ans

Abdelaziz Bouteflika est entré dans les cercles du pouvoir algérien dans les années 1970, en tant que ministre des Affaires étrangères. Il accède au sommet de l'Etat en 1999, fort du soutien de l'armée.

Il restera au pouvoir pendant 20 ans, avant d'en être chassé le 2 avril 2019, sous la pression des manifestations massives du mouvement pro-démocratie Hirak contre son intention de briguer un 5e mandat consécutif.

Depuis plusieurs années, ses apparitions publiques étaient rarissimes. Il avait été victime d'un accident vasculaire cérébral en 2013, qui l'avait laissé affaibli et aphasique.