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Alexis Corbière : «Il n’y a aucun intérêt à donner à lire "Mein Kampf"»

Alexis Corbière en février 2015 à Paris.

Le secrétaire national du Parti de gauche, qui enseigne l’histoire en lycée professionnel, donne raison à Jean-Luc Mélenchon en arguant que republier l’ouvrage d’Hitler ne satisfera que les antisémites.

Les éditions Fayard annoncent l’édition d’une version intégrale de Mein Kampf pour le début de l’année 2016. C’est un scandale. Et, pour l’instant, Jean-Luc Mélenchon est une des seules grandes voix à prendre position contre cette parution. Il a raison. Ceux qui partagent sa position doivent se faire entendre. Il s’agit d’un débat d’intérêt général dans un contexte politique suffocant où l’antisémitisme demeure, jamais loin de son double nauséabond : la haine contre le musulman.

Dans ce climat, pourquoi et pour qui éditer ce livre ?Les historiens, les chercheurs ? Assurément non. Mein Kampf est pour eux un livre facilement accessible en allemand comme en français, et une prochaine édition allemande en trois volumes devrait faire progresser la recherche sur le nazisme et la place singulière qu’y occupe ce livre. A l’inverse, les historiens français savent que le groupe réuni autour du projet de Fayard n’apportera rien de nouveau. Pour le reste, est-il nécessaire que cet ouvrage soit demain plus facile d’accès ? Achetable dans n’importe quelle grande surface ? Je ne le pense pas. Existe-t-il réellement en France un lectorat frustré par la difficulté à trouver cet ouvrage ? Non. Certes, on ne devient pas antisémite parce qu’on lit un livre antisémite, et seuls les convaincus y trouveront des arguments convaincants. Mais la lecture de Mein Kampf permettra à l’antisémite frustre de devenir demain un antisémite érudit. Est-ce là le rôle d’une grande maison d’édition et de son grand réseau de distribution ? Je ne le crois pas.

Car quel intérêt y a-t-il à donner à lire Mein Kampf ? Aucun. En vérité, la lecture de ce pensum assommant aux obsessions écœurantes (où l’on trouve 466 fois les mots juifs, juiverie ou judaïsme, 323 fois le mot race, 149 fois le mot marxiste, etc.) et (...)

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