Alexandre Grothendieck : le génie des maths qui accoucha de l'écologie

Dans la rivière, certains se baignent. Ils sont là à barboter dans l'Ain, près du pont de Chazey, où il est convenu qu'ils se retrouvent pour aller ensuite manifester contre la centrale du Bugey, à une vingtaine de kilomètres. En cet été 1971, ils sont un peu plus de 10.000. Un homme au crâne lisse regarde à distance. L'air sérieux. Grand. Plutôt costaud. "Ambiance très sympathique de bonne humeur, de camaraderie et de saine liberté, note Alexandre Grothendieck dans la revue Survivre… et vivre. Nombreux baigneurs et baigneuses nus sous un soleil radieux, d'autres en maillot, sans que personne trouve à redire aux uns ni aux autres."

A l'époque, la question du nucléaire n'en est pas encore une pour les Français. Un demi-siècle plus tard, Yves Cochet, qui deviendra ministre de ­l'Environnement de Lionel Jospin dans les années 2000, garde un souvenir intact et amusé de l'épisode : "On s'est baignés à poil, qu'est-ce que c'était joyeux!" On devine un soupçon de nostalgie. Rapidement, ce 10 juillet, de petits groupes s'agglutinent autour de Grothendieck. A priori, ce mathématicien reconnu par ses pairs comme un pur génie n'est pas ici dans son monde. Mais, depuis peu, il partage le combat des antinucléaires.

"Survivre... et vivre"

"Grothendieck était là et tenait oraison permanente, se souvient Cochet qui finissait alors sa thèse de mathématiques. C'était un peu le Sermon sur la montagne, il était assis avec autour de lui une cour d'admirateurs. Il était très radical, c'est ça qui ...


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