"Aidez-nous à sortir" : la lettre d'adolescents détenus au Venezuela depuis les manifestations
"On ne tiendra pas un jour de plus" : Theany Urbina lit une lettre écrite au crayon à papier et signée par son fils de 16 ans, ainsi que sept autres adolescents, détenus depuis les troubles qui ont suivi la réélection contestée de Nicolas Maduro fin juillet.
De source officielle, plus de 2.400 personnes ont été arrêtées lors des manifestations qui ont éclaté après la proclamation des résultats du scrutin du 28 juillet alors que l'opposition crie à la fraude revendiquant la victoire.
Parmi ces personnes arrêtées, une centaine de mineurs. Quatre-vingt-six ont été libérés, mais les signataires de la lettre, Miguel, le fils d'Urbina, Yenderson, Daiber, Hector, Bleider, Angel, Diomer et Alexander, sont toujours emprisonnés à Caracas, accusés de "terrorisme".
"Un jour, je quitterai cet endroit horrible, cet enfer auquel personne n'appartient", poursuit le texte que Mme Urbina a lu, la voix brisée, lors d'une manifestation jeudi à Caracas pour la libération des adolescents.
"Comment est-il possible de payer pour quelque chose que ni mes compagnons ni moi n'avons fait?" poursuit la lettre.
Les manifestations spontanées qui ont éclaté le 29 et le 30 juillet après l'annonce de la victoire de M. Maduro ont fait 27 morts, dont deux militaires, et quelque 200 blessés.
Miguel Urbina a été arrêté le 2 août alors qu'il mangeait des bonbons devant sa maison. "Deux fonctionnaires sont arrivés et l'ont emmené", raconte sa mère, une manucure de 32 ans, assurant qu'il n'a pas participé aux manifestations.
Son fils, comme les autres adolescents, est séparé des prisonniers de droit commun, souligne-t-elle. Mais, "il m'a dit qu'il avait peur. Mon fils n'est pas un criminel, il n'est pas un terroriste", insiste-t-elle.
- "Juste des jeunes" -
Les parents des adolescents ont remis un document jeudi au parquet pour demander leur libération.
"Nous sommes privés de notre liberté, enfermés comme si nous étions des criminels ou un danger pour la société, nous sommes innocents de toutes les charges dont ils nous accusent", poursuit la lettre.
Des proches affirment qu'avant leur transfert dans leur lieu de détention actuel, certains ont été torturés.
Nerida Ruiz, 39 ans, serre une photo de son fils vêtu de son uniforme scolaire : Angel Moises Ramirez, 16 ans également, est détenu depuis près de 60 jours.
Il a été "enlevé" de son domicile alors qu'il s'occupait de son frère d'un an et demi. Il est accusé de "vol aggravé, incitation à la haine, terrorisme et résistance à l'arrestation", une moto volée dans un entrepôt a été trouvée sur le chemin de sa maison.
"Il doit commencer sa dernière année d'école la semaine prochaine", souligne Mme Ruiz. "C'est ce qui l'inquiète le plus", souligne cette caissière dans un magasin de meubles.
Miguel Urbina lui n'allait plus à l'"école, obligé de "travailler. Mon mari travaille, je travaille et mon fils travaillait, il apprenait la menuiserie", affirme sa mère, brandissant la lettre manuscrite.
"La seule chose que nous demandons, c'est la justice (...) S'il vous plaît, aidez-nous à sortir de cet endroit horrible, soutenez-nous. Nous sommes juste des jeunes qui n'ont rien à voir avec ce qui se passe dans le pays, nous ne sommes pas des terroristes", implore la missive.
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