Affaire Skripal: L'ambassadeur de l'EU à Moscou rappelé

La Première ministre britannique, Theresa May. Les chefs d'Etat et de gouvernement européens sont convenus jeudi soir de rappeler l'ambassadeur de l'UE en poste à Moscou en guise de riposte symbolique à l'attaque au gaz innervant commise contre un ex-agent double russe. /Photo prise le 22 mars 2018/REUTERS/François Lenoir

par Robin Emmott, Gabriela Baczynska et Alastair Macdonald

BRUXELLES (Reuters) - Les chefs d'Etat et de gouvernement européens sont convenus jeudi soir de rappeler l'ambassadeur de l'Union européenne en poste à Moscou en guise de riposte symbolique à l'attaque au gaz innervant commise contre un ex-agent double russe, a-t-on appris auprès de trois diplomates.

Markus Ederer, le diplomate allemand qui dirige actuellement la délégation de l'UE à Moscou, "est rappelé pour consultations", a précisé l'un d'eux.

Plus tôt dans la soirée, les dirigeants européens avaient affiché leur soutien à la Grande-Bretagne, qui accuse la Russie d'être derrière l'empoisonnement de Sergueï Skripal et de sa fille Ioulia le 4 mars dernier à Salisbury, dans le sud de l'Angleterre.

Dans une déclaration commune, ils indiquent que le conseil européen "souscrit à l'analyse du gouvernement du Royaume‑Uni selon laquelle il est hautement probable que la Fédération de Russie soit responsable de cet acte et qu'il n'existe pas d'autre explication plausible".

La formulation va plus loin que le texte adopté en début de semaine par les ministres européens des Affaires étrangères, qui disaient "prendre très au sérieux" l'évaluation britannique sur l'attaque de Salisbury.

"Nous exprimons une solidarité sans faille avec le Royaume-Uni face à cette grave remise en cause de notre sécurité commune", ajoutent les dirigeants européens dans leur déclaration diffusée jeudi soir.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitry Peskov, a indiqué que la Russie regrettait cette décision qui a été prise, selon lui, sur des suppositions qui ne sont étayées par aucune preuve tangibles.

La Première ministre britannique, Theresa May, a attribué à la Russie la première attaque au gaz innervant connue commise sur le territoire européen depuis la Deuxième Guerre mondiale.

En représailles, Londres a expulsé 23 diplomates russes présentés comme des "agents du renseignement sous couverture" et suspendu les relations bilatérales avec la Russie; Moscou a répliqué en expulsant à son tour le même nombre de diplomates et en ordonnant la fermeture du British Council.

RÉSEAUX

Jeudi à Bruxelles, Theresa May a insisté sur la nécessité pour les Européens d'oeuvrer ensemble face au défi que représente la Russie.

"La Russie a organisé une attaque éhontée et irresponsable contre la Royaume-Uni", a-t-elle dit à son arrivée au conseil européen. "Il est clair, a-t-elle ajouté, que la menace russe ne respecte pas les frontières et que les événements de Salisbury constituent un modèle d'agression russe contre l'Europe et ses voisins proches."

Il lui a fallu convaincre des pays proches de la Russie, parmi lesquels la Grèce, la Hongrie et la Bulgarie.

"Les Etats membres se coordonneront quant aux conclusions à tirer à la lumière des réponses fournies par les autorités russes", poursuit la déclaration publiée jeudi soir.

Le texte insiste également sur la nécessité pour l'UE de "renforcer sa résilience aux risques de nature chimique, biologique, radiologique et nucléaire" et note que l'Union européenne et ses Etats membres doivent aussi continuer à "renforcer leurs capacités de lutte contre les menaces hybrides, y compris dans les domaines du cyber, de la communication stratégique et du contre-renseignement".

En fin d'après-midi, Theresa May avait rencontré Angela Merkel et Emmanuel Macron en marge du conseil pour discuter de l'affaire Skripal et de ses répercussions. Leur entretien, rapporte-t-on dans l'entourage du président français, a duré une vingtaine de minutes. La Première ministre britannique, la chancelière allemande et le président français étaient "totalement alignés", ajoute-t-on de même source, insistant sur l'existence d'une "volonté de coordination européenne".

"Ce que la Grande-Bretagne dit, c'est qu'il existe des réseaux qui organisent des actions du type Salisbury, que ces réseaux existent entre nos frontières et qu'il serait bon de les traquer ensemble", a déclaré pour sa part un haut responsable britannique.

(avec Jean-Baptiste Vey et Elizabeth Piper à Bruxelles; Henri-Pierre André pour le service français)