Affaire Grégory sur Netflix : les dessous d'un fait divers hors-norme

La série Netflix Grégory revient sur le meurtre du petit Grégory Villemin, dont le corps a été retrouvé dans la Vologne en 1984 alors qu'il n'avait que 4 ans.
La série Netflix Grégory revient sur le meurtre du petit Grégory Villemin, dont le corps a été retrouvé dans la Vologne en 1984 alors qu'il n'avait que 4 ans.

La série Grégory, disponible sur Netflix, retrace l’affaire autour du meurtre du petit Grégory Villemin, âgé de 4 ans. Patricia Tourancheau, l’une des co-réalisatrices revient, pour Yahoo, sur ce fait divers exceptionnel.

Les fans de faits divers ont trouvé leur nouvelle série : Grégory, un documentaire en 5 épisodes disponible sur Netflix depuis le 20 novembre. En près de cinq heures, le cinéaste Gilles Marchand, aidé de 4 co-réalisatrices, revient sur cette affaire hors du commun et toujours non résolue, portant le nom de sa victime, un petit garçon de 4 ans retrouvé mort dans la Vologne le 16 octobre 1984.

La journaliste Patricia Tourancheau, l’une des co-auteures et co-réalisatrices de la série, est revenue, pour Yahoo, sur ce projet. Et elle l’assure : si vous pensiez tout savoir sur ce fait divers marquant, vous risquez bien d’être surpris. “J’ai fait un livre sur cette affaire*, je la connais très bien et j’ai tout de même appris des choses sur l’humanité, sur les hommes, sur les femmes”. Pour autant, la cible affichée par Netflix est claire : un public jeune et étranger. Et, selon la plateforme, le succès est au rendez-vous.

“Rentrer dans l’intimité des personnages”

Il faut dire que le travail pour produire cette mini-série a été colossal. Pendant six mois, toute l’équipe a mené des recherches, fait des repérages, préparé des séquenciers - l’ossature du documentaire -, contacté les témoins... “Avec l’aide de trois documentalistes, on a retrouvé des kilomètres d’archives visuelles. On traquait la moindre image qui puisse nous restituer l’histoire”, détaille la co-déalisatrice. L’équipe a aussi pu compter sur les cassettes du journaliste de Paris Match Jean Ker, qui enregistrait ses interviews à l’époque. “Ça nous donnait accès à un matériau unique et aux voix des protagonistes de l’époque, on savait qu’on allait rentrer dans l’intimité des personnages de cette tragédie grâce à ces cassettes”, s’enthousiasme Patricia Tourancheau.

Outre ces archives, les réalisateurs ont également mené vingt interviews - parfois pendant plusieurs jours - et ils ont eu quelques surprises : “pour certains interrogés, on ne s’attendait pas du tout à ce qu’ils allaient nous dire”, précise la co-réalisatrice. Seize ont finalement été retenues.

Une “machine à broyer les Villemin”

“Le parti pris pour raconter cette histoire, ça a été de tricoter tous ces témoignages sans déformer les propos. (...) Chacun raconte, à sa façon, son rôle dans l’affaire, en apparaissant par ordre chronologique”, complète-t-elle.

Le but de ce travail, qui a duré un an en tout, c’était de “mettre au jour cet engrenage, cette machine à broyer les Villemin et d’autres, en démontant chaque rouage et en l’exposant, pour bien faire comprendre aux spectateurs, de façon pédagogique et sensible, comment s’est passée cette histoire”, synthétise Patricia Tourancheau.

“Toutes les composantes d’une grande affaire dramatique”

Mais pourquoi, 35 ans après les faits, cette affaire fascine-t-elle toujours ? “Ce fait divers-là recèle en lui même toutes les composantes d’une grande affaire dramatique”, résume Patricia Tourancheau. “Un corbeau qui se déchaîne pendant des années et déverse son fiel, la concrétisation de cette haine à travers le meurtre d’un enfant, des accusations d’infanticides à l’encontre de Christine Villemin, un premier suspect tué par le père de la victime… (...) mais aussi des personnages absolument hallucinants (...) la jalousie, la haine, l’amour, le crime, l’énigme, c’est universel” énumère la journaliste. .

“Savoir qu’un corbeau narguait tout le monde depuis deux ans et demi, qu’il a revendiqué son acte au moment-même de l’enlèvement” a créé une fascination, tout comme le fait qu’il s’agisse d’un crime d’enfant et que, très vite, les enquêteurs se tournent vers le milieu familial, retrace la co-réalisatrice.

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“Tout a déraillé”

C’est d’ailleurs toutes ces composantes qui font, qu’à l’époque, une folie médiatique a entouré cette affaire. Les journalistes d’alors en parlent d’ailleurs sans détour dans la série. Télévisions, radios et journaux nationaux ont envoyé des reporters à Lépanges-sur-Vologne pendant des mois, chacun d’eux espérant réussir là où les enquêteurs et la justice avaient échoué : faire toute la lumière sur le meurtre de Grégory.

Mais, tout comme le juge Lambert - dont les écarts de conduite et le caractère influençable sont dévoilés dans la série - certains journalistes ont, eux aussi, eu des comportements douteux, outrepassant leur fonction et piétinant la déontologie.

Réunions secrètes, alliances formées pour avoir des informations, guerre des clans… la série de Netflix dévoile les rouages d’un traitement médiatique au moins aussi hors norme que l’affaire elle-même. “Tout a déraillé, à tous les niveau… d’où le fiasco judiciaire et médiatique”, résume Patricia Tourancheeau. “On démontre dans la série comment un honnête homme, qui a perdu son enfant, se retrouve à tuer son cousin, qu’il prend pour le coupable. C’est lui qui tenait le fusil, mais les journalistes le disent eux-mêmes : ils ont, en quelque sorte, armé le bras de Jean-Marie Villemin”, poursuit-elle.

Après tout ce travail, la co-réalisatrice a-t-elle sa petite idée sur le ou les meurtriers ? “Je ne le dirais pas, les spectateurs se font leur propre idée avec la série”. Si beaucoup font déjà part de leurs hypothèses sur les réseaux sociaux, le mystère reste, aux yeux de la justice, entier.

*Gregory, la machination familiale

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