Publicité

Adoption d'une loi antiterroriste controversée au Kenya

NAIROBI (Reuters) - Le Parlement kényan a adopté jeudi une loi controversée durcissant le dispositif de lutte contre le terrorisme que ses détracteurs jugent liberticide. La réforme, dont l'examen a donné lieu à de vives altercations et jusqu'à des échanges de coups de poing dans l'enceinte du parlement, porte de 90 à 360 jours la durée de la garde à vue en matière d'antiterrorisme. Les médias s'exposeront par ailleurs à une amende s'ils diffusent des informations "susceptibles de susciter la peur ou la panique". La loi ne définit pas ces informations. Les propriétaires de logements seront contraints de fournir à la demande des autorités des renseignements sur leurs locataires. Cette réforme est une réponse du président Uhuru Kenyatta à l'attaque meurtrière menée en septembre 2013 par un commando d'islamistes somaliens contre le centre commercial Westgate de Nairobi, où 67 personnes ont été tuées. "Vous n'avez rien à craindre de ce projet de loi à moins d'être engagés dans des activités criminelles", a-t-il expliqué mercredi. Mais des organisations de défense des droits de l'homme considèrent que cette réforme met les libertés en danger. "Ce gouvernement tente de museler toute dissidence", a affirmé Patrick Gathara, essayiste et dessinateur de presse. Au Parlement, des élus de l'opposition ont réussi à retarder le vote avant d'être expulsés de l'enceinte tandis que les journalistes en étaient évacués avant le vote; la retransmission télévisée du débat a également été interrompue. A l'extérieur du Parlement, des militants hostiles à la loi ont été interpellés par les forces de police. Neuf ambassades étrangères, dont les missions diplomatiques des Etats-Unis, de la France, de la Grande-Bretagne et du Canada, ont apporté leur soutien à un renforcement de la sécurité au Kenya tout en estimant que les droits de l'homme devaient être respectés. "Protéger la constitution du Kenya et défendre les libertés civiques et la démocratie sont parmi les moyens les plus efficaces de renforcer la sécurité", soulignent-elles dans un communiqué commun. (James Macharia et Humphrey Malalo; Henri-Pierre André pour le service français, édité par Tangi Salaün)