Accusations contre l’abbé Pierre : l’Église ouvre ses archives privées sur le prêtre avec un demi-siècle d’avance
ÉGLISE - Faciliter « le travail de vérité ». La Conférence des évêques de France a annoncé, ce jeudi 12 septembre, ouvrir sans délai ses archives aux chercheurs, et notamment à ceux mandatés par Emmaüs pour enquêter sur l’abbé Pierre, accusé d’agressions sexuelles par une vingtaine de femmes.
« Cette durée est usuellement de minimum 75 ans après la mort du prêtre ou du religieux, selon le règlement des archives de la CEF », a indiqué l’institution dans un communiqué. L’abbé Pierre étant mort en 2007, elles auraient donc dû être révélées en 2082, dans un demi-siècle.
Des lettres prenant acte de son « comportement »
Il s’agit des archives de l’Église de France conservées à Issy-les-Moulineaux, distinctes de celles des diocèses. Concernant l’abbé Pierre, elles contiennent « un dossier assez mince » avec « quelques lettres » qui montrent que le Bureau central des cardinaux de l’époque « a pris connaissance du comportement » du prêtre, a déclaré Eric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims et président de la CEF sur RCF et radio Notre-Dame.
« Il y a un élément sur le fait qu’il est parti en Suisse » dans les années 50, mais sans « aucun détail sur ce qui s’y passe », et « c’est à peu près tout », a ajouté le responsable de la CEF.
Quant au degré de connaissance au sein de l’Église de ces agissements, Mgr de Moulins-Beaufort s’est redit « incapable de dire » qui savait quoi. « Quelques évêques ont su, certainement, un certain nombre de faits, mais exactement lesquels ? Il faudra une enquête historique pour le dire et j’encourage vivement l’enquête qu’Emmaüs vient d’ouvrir », a-t-il ajouté.
Des « dysfonctionnements » du côté de l’Église comme d’Emmaüs
Après la révélation le 6 septembre de nouveaux témoignages de femmes accusant l’abbé Pierre d’agressions sexuelles, Emmaüs a annoncé une commission indépendante chargée « d’expliquer les dysfonctionnements » qui lui ont permis « d’agir comme il l’a fait pendant plus de 50 ans ».
Sur ce point, Mgr de Moulins-Beaufort a rappelé que l’abbé Pierre « n’a pas vécu dans un cadre ecclésial, il a vécu avec Emmaüs » et « c’est de ce côté-là qu’il y a des archives. C’est par là surtout qu’il faut essayer de comprendre ». « Dans les années 50, quand ce comportement commence à être connu, il inquiète beaucoup et l’Église essaie de l’aider en lui imposant un séjour psychiatrique en Suisse » et un compagnon. « Apparemment, l’abbé Pierre a toujours réussi à contourner cela. Mais je ne dirais pas que l’Église n’a rien fait », a-t-il affirmé.
« L’Église n’a plus peur de faire ce travail de vérité sur les agressions qui ont pu être commises dans l’Église », a, de son côté, insisté sur franceinfo le Père Hugues de Woillemont, secrétaire général et porte-parole de la CEF. Pour les victimes, il affirme qu’il « faut faire ce travail historique pour comprendre les dysfonctionnements qui ont permis les agressions de l’abbé Pierre, du côté de l’Église comme d’Emmaüs ».
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