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Accès aux eaux britanniques : les pêcheurs normands menacent de couper le courant

Pêcheurs normands et élus, une centaine de personnes se sont rassemblées samedi sur la plage de Pirou (Manche) à l'est de Jersey, à l'appel du comité régional des pêches, pour exprimer leur inquiétude à quelques jours de la fin des licences provisoires d'accès aux eaux britanniques, le 30 septembre.

Les pêcheurs rejoints par une dizaine d'élus locaux en écharpes tricolores, avaient choisi de se réunir sur la plage d'Armanville d'où part un câble d'alimentation électrique de 90 000 volts pour alimenter Jersey.

"C'est pour montrer à Jersey que nous, justement, on a été solidaires de leurs besoins énergétiques et qu'ils doivent aussi faire l'effort d'être solidaires avec nos pêcheurs", a estimé Noëlle Leforestier, maire de Pirou.

"Aujourd'hui on se retrouve dans une situation d'impasse complète avec un compte à rebours qui est en route", a déclaré Bertrand Sorre, député LREM de la 2e circonscription de la Manche.

Des conditions d'attributions de permis strictes

Alors que les autorisations provisoires données aux pêcheurs de la Manche pour pêcher dans les eaux anglaises courent jusqu'au 30 septembre, "cela veut dire que dans quelques jours, ces pêcheurs ne savent absolument pas s'ils pourront continuer leur métier, s'ils pourront accéder à ces zones de pêche qui sont vitales pour eux", a rappelé le député.

Les exploitants français doivent notamment prouver qu'ils pêchaient dans ces eaux entre 2017 et 2020, pour prétendre à un permis alors "qu’on sait pertinemment sur les traces GPS" quels sont "les bateaux qui ont l’habitude de pêcher dans leurs eaux" a-t-il dénoncé.

"On demande de produire des documents papiers ; aujourd’hui, on a vraiment le sentiment d’une mauvaise volonté ou d’une mauvaise foi de la part des autorités jersiaises et anglaises pour retrouver cette sérénité et cette possibilité d’exercer son métier" a-t-il ajouté.

À ce jour, une cinquantaine de bateaux français de plus de 12 mètres ont obtenu un permis de pêche, sur plus de 300 demandes. Pour les plus petits navires, l'autorisation est encore plus difficile à obtenir, car ils n'ont pas l'obligation de détenir un système de géolocalisation.

Couper l'électricité de Jersey

Marc Delahaye, directeur du comité des pêches de Normandie, craint qu'après le 30 septembre, "on ne se retrouve avec plein de bateaux à quai". "C'est là où on aura une explosion et derrière il y aura une destruction de la filière navale, à la criée de Granville, le marayage, les transporteurs, les avitailleurs en matériel. C'est là où cela devient insupportable".

Il craint un impact immédiat de 20 à 80% sur la production de pêcheurs et que "pour certains (ce soit) la clé sous la porte très très rapidement".

Face à l'urgence de la situation, les pêcheurs français menacent de couper l'électricité que la France fournit à Jersey. Le câble d'alimentation de 90 000 volts se trouve sur la plage d'Armanville, dans la commune du Pirou.

Sujet explosif tout au long des négociations sur les conditions de la sortie du Royaume-Uni de l'UE, l'accès des pêcheurs européens aux eaux britanniques reste un sujet de tension malgré l'accord sur les relations post-Brexit trouvé entre Londres et Bruxelles, en vigueur depuis le 1er janvier.

Début mai, des dizaines de bateaux de pêcheurs normands et bretons s'étaient massés dans le port de Saint-Hélier à Jersey pour manifester leur mécontentement et défendre leur droit de continuer à pêcher dans les eaux de Jersey, provoquant l'envoi par Londres de deux patrouilleurs avant que la situation ne rentre dans l'ordre dans la journée.