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2014 : l'horizon s'éclaircit après trois ans de stagnation

Euro en baisse, pétrole en berne et taux historiquement bas, Noël est arrivé en avance pour le gouvernement français, qui a tous les éléments pour croire à un rebond de l'économie en 2015 après trois années de quasi-stagnation. /Photo d'archives/REUTERS

par Yann Le Guernigou et Jean-Baptiste Vey PARIS (Reuters) - Euro en baisse, pétrole en berne et taux historiquement bas, Noël est arrivé en avance pour le gouvernement français, qui a tous les éléments pour croire à un rebond de l'économie en 2015 après trois années de quasi-stagnation. Mais même si elle bénéficiera aussi des effets des baisses des charges et de la fiscalité des entreprises, la reprise devrait rester insuffisante pour enrayer la hausse du chômage. Le rebond risque de ne pas suffire non plus à rassurer les partenaires européens de la France, qui s'est une nouvelle fois affranchie des règles en matière de discipline budgétaire. Les réformes promises en échange pour redresser l'économie sont saluées comme allant dans le bon sens. Elles apparaissent pourtant timides au vu de l'ampleur des maux structurels de l'économie et se heurtent à du scepticisme dans la majorité, voire à une franche hostilité dans sa fraction la plus à gauche, ce qui suscite des doutes quant à la possibilité de les faire adopter sans les édulcorer. L'année qui s'achève aura une nouvelle fois déçu, avec une croissance qui devrait être limitée à 0,4%, aussi poussive qu'en 2012 et 2013 et moitié moindre que le 0,9% espéré à l'origine par le gouvernement, du fait d'un premier semestre difficile. La perspective d'une inversion de la courbe du chômage reste éloignée, un an après le rendez-vous manqué par le gouvernement. Le nombre de demandeurs d'emploi a augmenté de près de 5% sur les dix premiers mois de 2014 et les économistes n'attendent pas de réelle inflexion avant 2016, d'autant que les défaillances d'entreprises restent proches de niveaux records. CLARIFICATION POLITIQUE 2014 aura aussi été marquée par une clarification politique, avec le départ du gouvernement du franc-tireur Arnaud Montebourg, trop dissonant par rapport à la ligne officielle. Avec son remplacement au ministère de l'Economie par Emmanuel Macron, ancien banquier, dans un gouvernement dirigé par Manuel Valls, François Hollande a affirmé son orientation réformiste, non sans provoquer des grincements dans sa majorité. Cette politique trouve son illustration dans le projet de loi sur la croissance et l'activité présenté mi-décembre, qui veut faire sauter de nombreux verrous de l'économie française. Couvrant un large champ, de la réforme des professions du droit à celle de la justice prud'homale en passant par les transports par autocar, il suscite l'hostilité des catégories visées et une vive controverse au Parti socialiste. Les élus du PS se déchirent autour d'un de ses points les plus symboliques, l'extension du travail dominical, ce qui fait peser des doutes sur le sort de la loi. Le gouvernement a pourtant renoncé à y inclure des sujets encore plus explosifs comme une réforme du marché du travail, des professions de santé et des taxis. Bien que l'exécutif s'en défende, la loi Macron apparaît comme la réponse aux recommandations faites à la France par la Commission européenne et les autres organisations internationales pour augmenter son potentiel de croissance. Ses grandes lignes ont été dévoilées en octobre, au moment où la France reportait à 2017 l'objectif de ramener son déficit public à 3% du PIB, au lieu de 2015. Le budget 2015 prévoit d'atteindre 4,1%, un niveau qui paraît toujours optimiste. EUROPE ET BCE À LA RESCOUSSE La Commission européenne, qui dira en mars s'il y a lieu de sanctionner la France, a indiqué qu'elle analyserait les réformes mises en oeuvre au moment de rendre son verdict. Pour sa défense, le gouvernement, qui avait déjà obtenu en 2013 un délai de deux ans pour parvenir à 3%, a invoqué l'impact de la faiblesse de la conjoncture et de l'inflation sur ses rentrées fiscales, alors que les dépenses sont contenues. Il insiste en outre sur la nécessité d'une politique européenne plus favorable à la croissance et souhaite une politique de la Banque centrale européenne "plus adaptée" à l'environnement de très faible inflation et ce, dès janvier. En attendant une décision sur de possibles achats de dette souveraine, la BCE est déjà parvenue à faire plonger les taux de la zone euro au plus bas, le rendement des obligations françaises à 10 ans étant inférieur à 0,90%. Outre ces niveaux de financement exceptionnellement bas, l'action de la BCE a permis d'affaiblir l'euro, qui a perdu plus de 10% de sa valeur face au dollar depuis le début de l'année. Si l'on ajoute l'impact de la chute des cours du brut depuis l'été, l'économie française aborde 2015 avec un potentiel de croissance supplémentaire de 0,1 point de PIB par trimestre, selon l'Insee. Et le scénario d'une croissance de 1,0% en 2015 porté par le gouvernement, qui semblait encore optimiste à l'automne, paraît aujourd'hui plus crédible, à la condition toutefois que la BCE et les Européens parviennent à écarter les risques de déflation. Malgré cette accélération, la France devrait connaître à nouveau une croissance économique plus faible que la moyenne de la zone euro en 2015, selon l'OCDE (qui prévoit respectivement 0,8% et 1,1%) ou la Commission européenne (0,7% et 1,1%). (édité par Yves Clarisse)