Évasion à la prison de Mauzac: qu'est-ce qu'un centre de détention semi-ouvert?
Il n'en existe que deux en France. En Corse, au centre de détention de Casabianda, et en Dordogne, à la prison de Mauzac, les détenus bénéficient d'un fonctionnement hors du commun. Le but: préparer leur future libération en leur octroyant le plus d'autonomie possible et ainsi, optimiser leur réinsertion socio-professionnelle. Un contrat de confiance qui essuie parfois des échecs...
Ce lundi, l'un des prisonniers du centre de Mauzac a faussé compagnie aux surveillants pénitentiaires pendant sa formation à la ferme-école dépendant de la prison, "mais se trouvant en dehors de la zone sécurisée et close de la détention", nous indique la procureure de la République de Bergerac, Sylvie Martins-Guedes.
Condamné en 2008 à 28 ans de réclusion criminelle pour un double assassinat, Philippe Dubois avait rejoint cet établissement pénitentiaire en septembre dernier pour purger la fin de sa peine, fixée en mai 2026. En quoi consiste exactement le fonctionnement d'une prison dite "ouverte"?
Les détenus ont la clé de leur cellule
D'une capacité totale de 369 places, le centre de détention de Mauzac est divisé en deux parties, décrit l'Observatoire international des prisons (OIP). Une première construite en 1939 de manière sécuritaire, avec des murs d’enceinte interdisant tout regard vers l’extérieur, compte 117 places. Une seconde, érigée en 1986 à l'initiative du ministre de la Justice de l'époque, Robert Badinter, dans l'esprit d'une prison "ouverte" comprend 252 places. Cette division est entourée de grillages permettant la vue sur les prairies et la route avoisinantes.
Elle est composée de 21 pavillons, incluant chacun 12 cellules individuelles réparties sur deux étages, détaille l'OIP. "Aux espaces privés, s’ajoutent des lieux de vie conviviale, notamment une cuisine, des douches et une salle commune. Aucun couloir, ni coursive, ni sas, ni caméra, ni serrure électrique n'a été installé en son sein", décrit l'Observatoire de la justice pénale dans un rapport de 2021.
Ici, "tout détenu possède la clé de sa propre cellule et certains peuvent bénéficier d’une formation horticole dans la ferme-école située à deux kilomètres de la prison", rapporte l'OJP.
Durant la journée, les détenus placés dans cet établissement sont donc libres de leurs mouvements, de choisir leurs activités, et ce, jusqu'à 19h, heure à laquelle les portes se ferment pour la nuit. C'est dans cet environnement que Philippe Dubois évoluait, jusqu'à son évasion ce lundi. "Il avait été admis en février 2023 en formation à la ferme-école du centre de détention de Mauzac. Cette formation consiste en des travaux horticoles", nous précise la procureur de la République de Bergerac.
Donner un sens à la peine
"Les détenus s’y rendent et y travaillent encadrés par des surveillants de l’administration pénitentiaire", ajoute la magistrate. Si cet espace n'est pas entouré de miradors ni de barbelés, les détenus restent en effet soumis à la vigilance des surveillants.
"Cela reste une prison. Il y a des barbelés en hauteur qui empêchent physiquement de sortir mais le dispositif est moins lourd que dans certains autres établissements", martelait en 2018 Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois à l’Assemblée nationale, lors d'une visite de l'établissement.
Et de l'avis de la directrice de la prison de Mauzac, ce fonctionnement "donne du sens à la peine" carcérale. "Je pense que c’est bénéfique pour les détenus qui sont ainsi moins désociabilisés. Ici, parfois, arrivent des personnes qui ont passé des années dans des prisons traditionnelles. Certains ont perdu tout repère au point - c’est arrivé - de demander à repartir", explique Caroline San Nicolas à Ouest-France.