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Éric Zemmour candidat à la présidentielle: pourquoi le polémiste est finalement sorti de l'ambiguïté

Eric Zemmour lors du salon Made in France le 14 novembre 2021 - Thomas SAMSON / AFP
Eric Zemmour lors du salon Made in France le 14 novembre 2021 - Thomas SAMSON / AFP

Depuis des semaines, les rumeurs se sont multipliées. Quand Éric Zemmour allait-il annoncer sa candidature à l'élection présidentielle de 2022? Un temps envisagée, la date du 9 novembre avait finalement été écartée. L'anniversaire de la mort du Général de Gaulle, pourtant éminemment politique, aurait pu ressembler à de la "récupération", d'après l'un de ses lieutenants. C'est finalement via une vidéo publiée sur YouTube que le polémiste a officialisé sa décision ce mardi.

"J'ai décidé de me présenter à l'élection présidentielle pour que nos enfants ne connaissent pas la barbarie, pour que nos filles ne soient pas voilées et nos fils soumis", a expliqué l'ancien journaliste, après des mois de vrai-faux suspense.

Un agenda classique

Si l'officialisation de ses aspirations pour le scrutin semble avoir tardé, elle s'inscrit dans une logique assez similaire à d'autres candidatures qui se voulaient, elles aussi, hors système: 16 novembre 2016 pour Emmanuel Macron, 2 décembre 2006 pour François Bayrou, Raymond Barre le 8 février 1988...

C'est que, légalement d'abord, rien n'obligeait le polémiste à se déclarer dès maintenant. Seule contrainte juridique: le dépôt des 500 parrainages d'élus locaux le 13 mars devant le Conseil constitutionnel, qui établit au plus tard le 18 mars la liste officielle des candidats pour 2022.

Le polémiste était déjà également en capacité de recevoir des financements, l'association Les amis de Zemmour ayant été agréée par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politique.

"C'est mon intérêt de ne pas me déclarer", n'a d'ailleurs cessé de répéter ces derniers mois l'ancien chroniqueur, conscient que son ambiguïté alimente la curiosité autour de sa candidature. " 876450610001_6280774491001

Creux sondagier

Mais l'essayiste a finalement dû se résoudre à se prononcer clairement. En cause d'abord, son creux sondagier.

Mercredi dernier, notre sondage Elabe "Opinion 2022" a ainsi jaugé les intentions de vote en faveur de Marine Le Pen entre 20 et 22% selon les cas, en progression de deux à quatre points. Éric Zemmour lui n'est plus mesuré qu'entre 12 et 15%, en chute de deux points. Après une dynamique inédite, sa progression s'est brutalement arrêtée, comme le montre notre agrégateur de sondages, l'Élyséemètre.

Une mauvaise passe après une séquence compliquée pour le polémiste: se sont succédés ses propos polémiques devant le Bataclan, des déplacements à Londres et à Genève où il était persona non grata, et un déplacement chahuté à Marseille. Tancé à plusieurs reprises par des manifestants, le désormais candidat a fini sa visite de la Cité phocéenne par un doigt d'honneur à une habitante.

Convaincre les maires

Autre motivation pour sortir du bois, la chasse aux parrainages d'élus.

"Les maires n'ont pas forcément envie de donner leur signature à quelqu'un qui n'est pas vraiment sûr d'y aller. Ça va faciliter les choses d'avoir officiellement sa volonté de se présenter", estime Étienne Girard, rédacteur en chef de L'Express et auteur de Le radicalisé. Enquête sur Eric Zemmour, auprès de BFMTV.com.

Fin octobre, le candidat avait pour l'instant levé environ 200 signatures sur les 500 nécessaires d'après Libération. Ce mauvais chiffre s'expliquerait notamment par l'absence d'ancrage local du candidat et le manque d'expérience de ses équipes en charge de cet exercice compliqué.

Autre motivation pour cette prise de parole: l'éventuelle lassitude de ses soutiens. "C'est sûr que si à un moment, on sent qu'en réalité, il hésite encore, on va commencer à fatiguer", a lâché un élu qui le soutient auprès de BFMTV.com il y a quelques semaines.

Lever des fonds

Enfin, la question des financements a pesé dans la balance. "Lever de l'argent sera également plus évident pour lui une fois que les choses seront bien claires. Une banque ne vous prête pas de fonds tant que vous n'avez pas déclaré officiellement votre candidature", raconte également à BFMTV.com, un collaborateur parlementaire, spécialiste des levées de fonds pour les candidats à la présidentielle.

"Il y a également la question des dons. C'est compliqué de convaincre des sympathisants de vous faire des chèques s'ils ne sont pas certains qu'ils serviront bien à financer votre présence sur la ligne de départ", décrypte encore ce spécialiste du financement de la vie politique.

Le sujet est devenu d'autant plus urgent que le milliardaire Charles Gave, qui a prêté 300.000 euros au candidat en octobre, lui a finalement retiré son soutien.

"La route est encore longue"

Reste une inconnue: l'effet que va avoir sa candidature sur les sondages. "Je ne crois pas que cela change grand-chose à ses intentions de vote. Les Français ont déjà anticipé qu'il était candidat. Il ne va pas apporter beaucoup de nouvelles thématiques", estime le politologue Gilles Finchelstein, auteur d'une note pour la Fondation Jean-Jaurès sur les "limites" de la percée d'Eric Zemmour.

"La route est encore longue. Il va lui falloir avoir des ralliements LR de premier ordre à mettre en avant et avoir des porte-paroles qu'on imagine comme de futurs ministres. C'est très long de faire campagne pendant encore 5 mois", estime de son côté Étienne Girard.

Pour le polémiste officiellement candidat, le plus dur commence.

Article original publié sur BFMTV.com