Émeutes en Angleterre : derrière les violences, des sympathisants d’extrême droite motivés par des fake news

Les émeutes se multiplient en Angleterre sur fonds de rumeurs et de fausses informations relayées par des sympathisants d’extrême droite, après le meurtre de trois fillettes à SouthPort.

Des émeutes en cascade en Angleterre. De nouvelles violences ont éclaté ce vendredi 2 août dans le nord-est du pays, en lien avec le meurtre de trois fillettes à SouthPort. Des images diffusées sur les réseaux sociaux montrent des centaines de personnes se déchaînant dans le centre-ville de Sunderland, en attaquant la police et en mettant le feu à au moins une voiture.

Les forces de police britanniques se préparent à de nouvelles manifestations durant le week-end. Des effectifs supplémentaires ont été déployés à Londres, Liverpool et SouthPort. Selon l’association de lutte contre le racisme Hope Not Hate, plus de 30 appels à manifester ont été lancés dans tout le Royaume-Uni, la plupart répondant à un mot d’ordre anti-immigration « Enough is enough » (Trop c’est trop), largement diffusé sur les réseaux sociaux.

Depuis que trois fillettes ont été poignardées lundi par un adolescent de 17 ans lors d’un cours de danse sur le thème de Taylor Swift, les violences se sont multipliées dans les rues sur fonds de fake news instrumentalisées par des sympathisants d’extrême droite.

Lundi après-midi, la police avait annoncé avoir arrêté un jeune de 17 ans, qui a finalement été inculpé mercredi pour trois meurtres et de dix tentatives de meurtre. Cependant, conformément à la loi britannique concernant les mineurs, la police n’a pas révélé son identité dans un premier temps. Elle avait seulement déclaré qu’il vivait dans le village voisin de Banks.

Les réseaux sociaux, notamment TikTok et X (anciennement Twitter), n’ont pas tardé à être inondés de fausses informations au sujet de l’identité du suspect. En l’espace de quelques heures, plusieurs théoriciens du complot, faux sites d’informations et militants d’extrême droite ont ainsi affirmé qu’il était en réalité un demandeur d’asile musulman, arrivé au Royaume-Uni par bateau en 2023. Ces déclarations se sont accompagnées d’un nom du suspect, qui a été démenti par la police, rapporte le New York Times.

Pour autant, ces fausses informations, relayées par des figures de l’extrême droite britannique très suivies en ligne comme Tommy Robinson ou Andrew Tate, ont attisé les émeutes. Selon la police, deux cents à trois cents personnes, principalement des sympathisants du mouvement d’extrême droite anti-islam English Defence League (EDL), ont pris part à de premières échauffourées mardi.

Des foules en colère ont scandé le slogan « Anglais jusqu’à la mort », et plusieurs militants d’extrême droite ont commencé à jeter des briques sur la mosquée à Southport, tout près de l’endroit où les trois petites filles ont été tuées. « C’était terrifiant », a raconté à la presse britannique le président de la mosquée Ibrahim Hussein, coincé dans l’édifice pendant les heurts. « Cette méchanceté était incompréhensible », a-t-il ajouté.

Le lendemain, le maire de Liverpool, Steve Rotheram, s’est exprimé à Southport et a déclaré : « Ce que nous avons vu hier soir, c’est l’infiltration de personnes venues de tout le pays, attisées par les réseaux sociaux et poussées à la frénésie ». L’élu a ensuite déploré les violences subies par des dizaines de policiers blessés.

Dans la soirée de mercredi, les émeutes ont repris de plus belle avec une grande manifestation à Londres. Plusieurs centaines de personnes, drapeaux anglais à la main, ont crié devant Donwing Street « arrêtez les bateaux ! » et plusieurs autres des slogans anti-immigration. Le nom du fondateur de l’English Defence League, Tommy Robinson, a également été scandé.

L’English Defence League (Ligue de défense anglaise, EDL) a été évoqué à plusieurs reprises ces derniers jours par la police britannique, notamment la police de Merseyside, car soupçonné d’être en lien avec ces violences. Plusieurs manifestants ont en effet été identifiés comme étant des sympathisants de ce mouvement d’extrême droite anti-islam, très présent sur les réseaux sociaux.

Fondé en 2009, l’EDL s’est fait connaître en organisant régulièrement des manifestations contre l’islam radical, qui ont presque systématiquement été émaillées de débordements et de violences. Le mouvement a rapidement gagné en popularité jusqu’en 2011, mais connaît aujourd’hui un déclin de popularité.

Son fondateur, Tommy Robinson, reste cependant très mobilisateur. Figure de l’extrême droite britannique multi-condamné, ce dernier a démissionné de son propre mouvement en 2013, le jugeant trop extrême. Il continue cependant de développer des idées d’extrême droite.

Alors que les émeutes s’intensifiaient à SouthPort, il a d’abord relayé les fake news sur l’identité du suspect en déclarant : « Comment ce djihadiste a-t-il pu obtenir un visa d’étudiant pour venir au Royaume-Uni ? ». Il a également apporté soutien aux hooligans violents déclarant : « le pays se dirige vers des troubles civils de masse. Et qui peut les blâmer ? ». Tommy Robinson a par ailleurs qualifié de « fake news » les informations selon lesquelles l’EDL était impliquée dans les émeutes.

Selon le Guardian, la vice-première ministre britannique Angela Rayner a annoncé dans la soirée de mercredi que la ministre de l’Intérieur Yvette Cooper « examinerait » si l’EDL doit être interdite en vertu des lois antiterroristes.

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