Élection de Trump: la relation avec le Mexique et sa présidente à l'épreuve

Le président américain élu Donald Trump montre du doigt son épouse Melania Trump pendant la nuit électorale au West Palm Beach Convention Center à West Palm Beach, en Floride, dans le sud des Etats-Unis, le 6 novembre 2024 (Jim WATSON)
Le président américain élu Donald Trump montre du doigt son épouse Melania Trump pendant la nuit électorale au West Palm Beach Convention Center à West Palm Beach, en Floride, dans le sud des Etats-Unis, le 6 novembre 2024 (Jim WATSON)

Tensions commerciales, tarifs douaniers, renvoi massif de migrants : le retour triomphal de Donald Trump à la Maison Blanche et ses menaces mettent une nouvelle fois à l'épreuve la relation fondamentale avec le Mexique, premier partenaire commercial de Washington.

Au dernier jour de sa campagne, le candidat républicain avait donné le ton en menaçant de taxer à 25% les importations mexicaines "s'ils (les responsables mexicains) n'arrêtent pas cette vague de criminels et de drogues qui entrent dans notre pays".

"L'inquiétude autour de possibles hausses de tarifs douaniers fait plonger le peso", ont relevé les analystes de Saxo Bank. Mercredi matin, le peso s'échangeait à 20,60 pour un dollar, son niveau le plus bas en deux ans.

Le Mexique "n'a aucun motif de préoccupation", a temporisé sa présidente de gauche Claudia Sheinbaum dans sa première réaction mercredi matin.

L'ex-maire de Mexico a rappelé que les deux pays tiraient profit de leur intégration économique dans le cadre du traité de libre-échange avec le Canada (ACEUM) : "Nous ne sommes pas en compétition, au contraire, nous nous complétons".

"Au Mexique, la migration à la frontière nord (avec les Etats-Unis) a baissé de 75% entre décembre 2023 et aujourd'hui", a-t-elle avancé, en misant sur la poursuite du "dialogue" avec Washington.

De quel type sera le "dialogue" entre Donald Trump et Claudia Sheinbaum, féministe de gauche, scientifique de haut niveau, anglophone, qui a étudié dans sa jeunesse sur un campus en Californie ?

"Le problème (pour Trump), c'est que Sheinbaum n'est pas seulement une femme, mais une femme forte et intelligente. Et ce n'est pas le type de femmes avec lesquelles Donald Trump se sent à l'aise," analyse Pamela Starr, experte des relations américano-mexicaines à l'Université de Californie du Sud.

"Trump aime négocier à partir d'une position de force, ce qui signifie qu'il a tendance à utiliser un discours coercitif pour établir une position extrême à partir de laquelle il peut négocier", poursuit l'universitaire, jointe par l'AFP.

"Je pense qu'il va la défier. Mais elle est solide, et je soupçonne qu'elle ripostera aussi fort et qu'il devra trouver une sorte d'accord avec elle", conclut Pamela Starr.

Sur le dossier commercial, la menace de tarifs douaniers à 25% est un risque "non négligeable" pour le Mexique, dont 80% des exportations partent vers les États-Unis, selon Gabriela Siller, responsable de l'analyse économique pour le groupe financier Banco BASE.

Des tarifs douaniers punitifs "affecteraient les exportations, la création d'emplois formels, les investissements directs étrangers et la croissance économique", ce qui entraînerait probablement des dégradations de la note crédit du Mexique, a-t-elle expliqué.

- "Défi" -

Le dossier migratoire va représenter "un véritable défi dans les relations entre les États-Unis et le Mexique", reprend l'experte Pamela Starr. Selon elle, Trump "va certainement essayer de renvoyer le plus de migrants sans papiers possible".

Le président élu avait déjà agité la menace des tarifs douaniers pour lutter contre l'immigration lors de son précédent mandat.

"Et il a obtenu exactement la réaction qu'il souhaitait du Mexique", souligne Duncan Wood, président du Pacific Council on International Policy, une organisation à but non lucratif américaine. Mexico avait alors envoyé une délégation de haut niveau à Washington pour négocier un accord, détaille-t-il.

"Ce sont des menaces crédibles. Et Trump n'est pas un partisan du libre-échange. Je pense qu'il y a toutes les raisons de croire qu'il utilisera ce genre de menace pour amener le Mexique à faire exactement ce qu'il veut", développe M. Wood.

Le président Trump pourrait profiter de la révision du traité de libre-échange, prévue en 2026, pour obtenir de meilleures conditions, avance-t-il, estimant que les relations commerciales risquent de "devenir très compliquées".

"Une victoire républicaine pourrait impliquer un style de négociation plus agressif, générant plus d'incertitudes qui pourraient influencer le taux de change et l'inflation en particulier", anticipait avant la victoire de Donald Trump le vice-président de la société d'investissement Franklin Templeton à Mexico, Ramse Gutierrez.

En revanche, les experts ne pensent pas que Donald Trump mettra à exécution ses menaces contre les cartels mexicains (envoi de troupes au-delà de la frontière). "Toute action sur le terrain au Mexique ne serait tout simplement pas acceptée", souligne l'expert Duncan Wood.

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