Élection américaine 2024: Pennsylvanie, Arizona... Les 7 États qui pourraient faire basculer la présidentielle

Sept États pour déterminer le destin de tout un pays. Ce mardi 5 novembre, jour du scrutin présidentiel américain, plusieurs États seront particulièrement scrutés: la Pennsylvanie, le Michigan, l'Arizona, la Caroline du Nord, le Nevada, la Géorgie et le Wisconsin.

Surnommés les swing states, ces États clés ou États pivots sont considérés comme particulièrement cruciaux dans la course à la Maison Blanche car leur résultat est donné comme incertain, à l'inverse d'une Californie acquise depuis de nombreuses années au camp démocrate par exemple.

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Le système électoral américain très particulier joue aussi dans l'importance donnée à ces quelques États. De fait, il suit la règle du winner takes all permettant au candidat arrivé en tête, même de peu, d'emporter tous les grands électeurs de l'État en question. Les candidats focalisent donc stratégiquement leurs efforts sur les sept États qui peuvent permettre de faire pencher la balance en leur faveur.

• La Pennsylvanie

C'est en Pennsylvanie que Donald Trump et Kamala Harris ont choisi de donner leurs derniers meetings de campagne ce lundi, signe de l'importante convoitise qu'il suscite. En cause, le nombre élevé de grands électeurs, 19, qu'il permet de remporter.

"C'est un État capital qui sera scruté avec attention", assure Alexis Pichard, enseignant en civilisation américaine à l’Université de Paris-Nanterre, à BFMTV.com.

De tradition démocrate depuis les années 1990, cet État du Midwest a voté majoritairement pour Donald Trump en 2016, donnant une victoire précieuse dans la course à la Maison Blanche à l'homme d'affaires devenu ensuite président cette année-là.

Située dans le nord-est américain, la Pennsylvanie fait partie de la rust bell (ceinture de la rouille), surnom donné aux États du nord-est du pays frappés par la désindustrialisation. La population y est très divisée avec, d'une part, un électorat largement démocrate situé dans les grandes villes, comme Philadelphie et Pittsburgh, et constitué de nombreux Afro-Américains et, d'autre part, un électorat rural blanc traditionnellement républicain, auquel s'ajoute encore un électorat ouvrier pas insensible au discours pro-emploi soutenu par Donald Trump.

L'issue du scrutin dans cet État est l'une des plus incertaines. Les derniers sondages ne départagent pas clairement les deux candidats, donnés dans la marge d'erreur avec moins d'un point d'écart entre eux.

• L'Arizona

De tradition républicaine, l'Arizona a cependant placé Joe Biden en tête avec une très courte marge, 0,3 point, lors de la dernière présidentielle, en 2020, face à Donald Trump.

Cet État du sud a la particularité de partager une frontière avec le Mexique, les questions liées aux politiques d'immigration y sont donc centrales. Pour Aurore Portet, professeure à Sciences Po Lyon et spécialiste de la politique américaine, le scrutin se jouera notamment sur ce sujet.

L'accès à l'interruption volontaire de grossesse (IVG) devrait être l'autre grand enjeu du vote en Arizona. Pour Alexis Pichard, "la question de l'avortement a donné les clés à Joe Biden en 2020 et aux démocrates lors des midterms (les élections de mi-mandat en 2022 NDLR), grâce au vote des femmes" dans cet État.

Alors que le droit à l'avortement n'est plus garanti au niveau fédéral depuis 2022 et que Kamala Harris martèle sa volonté de défendre ce droit si elle devient présidente, l'IVG pourrait influer de façon particulièrement importante l'élection présidentielle.

• Le Michigan

État des Grands Lacs, le Michigan est, après la Pennsylvanie, l'un des swing states les plus pourvoyeurs de grands électeurs, puisqu'il permet au candidat arrivé premier d'en obtenir 15. C'est d'ailleurs le lieu du tout dernier meeting de Donald Trump lundi soir.

Très divisé, le Michigan a, depuis 2008, voté majoritairement pour le candidat finalement élu président, qu'il soit républicain ou démocrate. La situation se reproduira-t-elle cette année? Les derniers sondages donnent actuellement les deux candidats avec un écart très faible, situé dans la marge d'erreur.

Le Michigan a comme spécificité de recenser une importante communauté arabo-musulmane, d'environ 250.000 personnes, que se disputent les deux candidats. Or, le discours tenu par Kamala depuis le 7-Octobre, plutôt favorable à Israël tout en condamnant les frappes à Gaza, pourrait coûter des points à la démocrate auprès de cette population. "Cette position d'entre-deux est insuffisante" pour cet électorat, assure Alexis Pichard.

De quoi faire basculer le Michigan côté républicain? Pas si sûr, alors que le chercheur rappelle que Donald Trump adopte lui aussi un discours globalement pro israélien et qu'il a été notamment à l'origine du muslim ban lorsqu'il était président en 2017, ce décret imposant des restrictions d'entrée aux États-Unis surtout pour les pays à majorité musulmane. "In fine, il est difficile de prévoir le comportement (de l'électorat arabo-musulman) dans l'isoloir", estime Alexis Pichard.

• La Caroline du Nord

Seul swing state à avoir placé Donald Trump en tête en 2020, avec 1,3 point d'avance sur son rival, la Caroline du Nord a voté en majorité républicain lors des dernières élections. Seule exception, le scrutin de 2008, qui avait vu Barack Obama accéder à la Maison Blanche.

Malgré cette préférence notable pour le Grand Old Party ces dernières années, la Caroline du Nord est considérée comme susceptible de basculer dans le camp démocrate cette année. En cause, son "renouvellement démographique" lié à l'"attractivité" de ses grandes villes et qui voit arriver une population plutôt démocrate, explique Aurore Portet à BFMTV.com. De quoi donner bon espoir à l'ex-procureure de s'y imposer le 5 novembre.

Par ailleurs, la Caroline du Nord a été durement touchée par l'ouragan Hélène en septembre. Alors que la gestion par le gouvernement de cette catastrophe est fortement critiquée, certains habitants pourraient décider de se détourner de Kamala Harris. Les républicains essayent en tout cas de profiter de la situation en multipliant les accusations mensongères en direction de l'exécutif sur le sujet ces dernières semaines.

• La Géorgie

Comme la Caroline du Nord, la Géorgie est de tradition républicaine, mais elle connaît, elle aussi, un renouvellement de sa population qui fait évoluer les équilibres politiques ces dernières années.

"Atlanta est devenue la capitale démographique (de la Géorgie NDLR) avec une population noire, urbaine, diplômée, largement acquise au camp démocrate", explique Aurore Portet.

Signe de cette évolution, Joe Biden s'était imposé sur le fil en Géorgie en 2020, avec 12.000 voix de plus que Donald Trump. "La mobilisation de l'électorat noir a été un facteur décisif en 2020 et 2022 (pour les midterms NDLR)", soutient Alexis Pichard, assurant que, pour les candidats, "il sera difficile de faire sans" cet électorat encore cette année. À condition cependant que l'abstention, souvent élevée dans cette frange de la population, ne soit pas trop élevée.

Malgré ce changement démographique, la Géorgie possède aussi toujours "une population rurale largement républicaine", selon Aurore Portet. Résultat, selon cette spécialiste des États-Unis, la Géorgie est aujourd'hui un "État scindé en deux". D'autant que "les hommes noirs jeunes ne vont pas forcément voter pour Kamala Harris, parce que c'est une femme" et ne sont donc pas acquis aujourd'hui au camp démocrate, soutient-elle.

• Le Wisconsin

Lieu de naissance du parti républicain, le Wisconsin vote ces dernières années plutôt démocrate. Il avait même choisi très largement Barack Obama en 2008, arrivé avec près de 14 points d'avance face à son adversaire républicain.

Les résultats ont été plus serrés cependant lors des derniers scrutins. Le Wisconsin a donné l'avantage à Donald Trump en 2016, avant que Joe Biden ne l'emporte en 2020, suivant à chaque fois la tendance au niveau national. Signe de l'importance que les républicains y accordent, le Wisconsin a été le lieu de leur grande convention en juillet dernier.

Berceau de la Harley Davidson, le Wisconsin est touché par la désindustrialisation comme plusieurs États du Midwest, dont la Pennsylvanie et le Michigan qui avaient voté comme lui républicain en 2016 et démocrate en 2020. Reste à voir si ces trois États voteront encore une fois de concert le 5 novembre, offrant potentiellement la victoire à l'un ou l'autre candidat.

• Le Nevada

Le Nevada est probablement l'État clé le moins souvent évoqué dans cette campagne présidentielle. En cause, le faible nombre de grands électeurs qu'il permet de remporter, 6, soit le plus faible total pour un État pivot. Le Nevada ne peut malgré tout pas être négligé par les candidats, l'élection pouvant se jouer à quelques grands électeurs.

Depuis 2004, le Nevada a toujours placé un démocrate en tête à chaque élection présidentielle, mais les républicains espèrent cette fois l'emporter notamment en séduisant les Latinos qui représentent environ 20% de la population de l'État. La récente polémique suscitée par un humoriste qui, lors d'un meeting de Donald Trump, a comparé Porto Rico à une "île flottante d'ordures", pourrait cependant détourner cet électorat du camp républicain.

Pour convaincre les habitants, Donald Trump adopte un discours pro-emploi qui trouve un écho particulièrement favorable dans le Nevada. De fait, l'État a beaucoup souffert de la fermeture des hôtels et des casinos, à Las Vegas, lors de la pandémie de Covid-19. Encore aujourd'hui, le taux de chômage y est particulièrement élevé par rapport au reste du pays (5,6% en septembre).

À moins d'une semaine du vote, les deux candidats sont donnés à moins d'un point d'écart dans les intentions de vote. Dans le Nevada, comme à l'échelle fédérale, le scrutin s'annonce comme particulièrement incertain. "Il faut s'attendre à des rebondissements jusqu'au bout", prévient Alexis Pichard.

Article original publié sur BFMTV.com