Ce que les égouts disent de notre santé et de nos habitudes : l'analyse des eaux usées, une science en plein essor
Les études chimiques et biologiques des eaux usées retracent notre quotidien. Combinées à une expertise sociologique, elles fournissent des informations précieuses pour l’établissement de politiques publiques comme des campagnes de prévention.
"L’égout, c’est la conscience de la ville. Tout y converge et s’y confronte. Dans ce lieu livide, il y a des ténèbres, mais il n’y a plus de secrets". C’est avec cette citation de Victor Hugo, issue du livre 2, L’intestin du Léviathan, du cinquième tome des Misérables, paru en 1862, que le chimiste Thomas Thiebault, maître de conférence à l’École Pratique des Hautes Études-PSL, ouvre sa présentation lors du colloque Chimie et eau à la Maison de la Chimie le 6 novembre dernier. Dans un entretien pour La Recherche, il nous éclaire sur ces "ténèbres" qui ruissellent sous nos pieds.
"On peut retracer la consommation de drogues et revenir à un nombre de doses par personne et par jour"
Depuis 2021, le réseau Obépine a prouvé l’utilité de mesurer les niveaux de circulation du SARS-CoV‑2 dans les eaux usées pour surveiller l’évolution de l’épidémie de Covid-19 ; depuis, les recherches épidémiologiques reposant sur l'analyse des eaux usées gagnent en notoriété.
Tout a commencé dans les années 1940 à Yale (Etats-Unis) où les études se concentraient sur la détection de drogues. Evidemment, s'il semble facile de demander au primeur combien de kilos de légumes ont été vendus, puis d'en déduire les habitudes nutritionnelles des habitants du quartier, on imagine plus difficilement faire pareil avec la consommation de MDMA... A l'heure actuelle, ce sont non seulement les substances illicites qui sont recherchées dans les échantillons des stations d'épuration, mais également les médicaments, les bactéries, les virus, et autres molécules organiques reflétant nos quotidiens. "En s’intéressant aux eaux usées, on étudie l’état de santé des gens au sens large", explique Thomas Thiebault.
Le projet EGOUT dont il fait partie est une collaboration entre chimistes, géologues, biologistes, informaticiens mais également sociologues et géographes. Il vise à établir un "diagnostique du niveau de bien-être, de santé, des habitudes alimentaires, de l’impact sur l’environnement". Cet observatoire p[...]
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