Ça : Pourquoi il faut absolument lire le roman de Stephen King

SPOILERS - Attention, l'article ci-dessous dévoile de potentiels spoilers sur le film et le roman "Ça". Si vous ne souhaitez pas en connaitre la teneur, merci de ne pas lire ce qui suit...

Si comme des millions de spectateurs, vous avez été conquis par Ça et que vous en voulez encore, il est possible de poursuivre votre exploration de Derry et de ses fantômes. D'une part, l'expérience se prolongera au travers d'une suite, qui dévoilera les membres du Club des ratés à l'âge adulte, c'est-à-dire 27 ans plus tard. Une suite qui devrait comporter des flashbacks, les jeunes acteurs ayant déjà signé pour y apparaître. 

D'autre part, et en attendant cette suite, vous pouvez dès à présent poursuivre votre quête en terre Kingienne, en lisant le fameux roman Ça, dont le film est adapté. Que vous l'ayez déjà lu, oublié au fil des années, ou que vous n'ayez ni le temps ni l'envie de vous y mettre, voici quelques informations qui pourraient vous intéresser... Ou vous faire changer d'avis ! 

L'histoire derrière la naissance du roman


Le Club au grand complet

Le roman Ça, c'est d'abord une cascade de chiffres impressionnants. Plus de 1100 pages. Le plus gros succès de l'année 1986 en librairies. Pour preuve, le roman est resté 35 semaines sur la liste des best-seller du New York Times, dont 14 à la première place.

Mais, Ça, c'est aussi une magnifique exploration de l'enfance. Car Stephen King n'est pas "que" le maître de l'horreur. L'auteur américain, qui sévit en littérature depuis les années 70, a en effet embrassé le fantastique, la SF, le polar mais aussi le roman d'apprentissage. Au fil de ses histoires, il a ainsi toujours eu l'art de raconter avec délicatesse le passage délicat de l'enfance à l'âge adulte. Un passage qui se fait souvent chez lui par la découverte du mal et, donc, par l'intermédiaire de monstres fictifs et symboliques figurant les monstres de la vie réelle, comme le sont les adultes, terribles, ignorants et abusifs, dans Ça... 

Stephen King met beaucoup de lui et de ses propres expériences dans ses livres. Ça n'est pas une exception. S'il ne s'agit pas d'une oeuvre complètement autobiographique, le roman emprunte à ses souvenirs et à un certain fantasme de l'enfance. Les héros du roman Ça ont effectivement le même âge qu'avait King en 1958, c'est-à-dire 11 ans. Quant à la ville de Derry, déjà mentionnée dans la nouvelle "Le corps" (qui a donné lieu au film Stand By Me) et "Pet Cemetery", elle s'inspire clairement de Bangor, la ville de Stephen King. Sur son site internet , l'auteur explique d'ailleurs le long processus qui l'a amené à imaginer cette histoire en 1978... mais à ne la débuter qu'en septembre 1981. 

Tout est donc né à Boulder dans le Colorado où King résidait avec sa famille en 1978. Au retour d'un déjeuner, la voiture de l'écrivain lâche et, dès le lendemain, il se met en chemin pour la récupérer chez le garagiste. Mais, au lieu d'y aller en taxi, King décide de marcher et se retrouve seul sur une route de campagne alors que la nuit commence à tomber. En traversant un pont en bois, il repense au conte "The Three Billy-Goats Gruff" dans lequel un troll sévit...

Sa forte imagination se met alors en route. Des années passent et King rappelle à ses souvenirs la ville de Bangor et son étrange canal - et donc ses égouts - qui scinde la ville en deux. Puis, il se souvient d'une autre ville où il a vécu, Stratford, où la librairie avait cet étroit corridor qui connectait la section des enfants à celle des adultes. King imagine que ce corridor est aussi un pont, avec toutes sortes de dangers, que les enfants doivent traverser avant de devenir des adultes. Et tapie, sous ce pont, se trouve une bête...

Stephen King se met alors à écrire l'histoire de cette bande de sept copains et leur rencontre avec un Mal terrible et ancien, qui peut prendre différentes formes, qui sévit tous les 27 ans et qu'ils décident d'appeler "Ça". Pour cette histoire d'enfance et d'horreur, King choisit de partir sur un récit complexe, non linéaire en alternant deux époques...

Les différences entre le film et le roman


Mike n'a pas perdu ses parents dans le livre

Devant ce récit complexe et passionnant qui passe d'une époque à une autre en donnant la lumière à sept personnages différents, plus quelques autres personnages secondaires, vous imaginez bien tous les problèmes qu'ont dû rencontrer les scénaristes du film ! Il est effectivement impossible de tout dire, même en deux parties. En attendant de voir comment la seconde partie va poursuivre le récit sur grand écran, on peut d'ores et déjà noter quelques différences notables entre le roman et le film, pourtant très fidèle à son modèle... 

1. Des années 50 aux années 80

La première grande différence concerne la linéarité du récit et son époque. Quand Stephen King place l'action de son roman en 1957-1958 puis en 1984-1985 et alterne entre les deux, le réalisateur Andy Muschietti ne s'en tient, dans le premier film, qu'à une époque, qu'il avance grandement dans le temps. Bill, Ben, Mike ou Beverly vivent en effet dans le Derry de la fin des années 80, leur histoire se déroulant entre 1988-1989 dans le premier film. Avec ce changement de période, l'équipe assure donc leur part de nostalgie à ceux qui ont lu le livre dans les années 80 et à ceux qui ont découvert la minisérie dans les années 90 et promet aussi un second film très contemporain. Etant donné que le premier film se déroule en 1988-89, la seconde partie, qui aura lieu 27 ans plus tard, se tiendra donc logiquement entre 2015-16. 

2. Des monstres différents

Avec ce changement d'époque, le film a dû s'adapter et a choisi de montrer l'horreur différemment. Les monstres que Pennywise choisit d'incarner pour effrayer les enfants ne sont ainsi pas les mêmes dans le film et dans le livre. Dans le roman, les enfants sont biberonnés aux monstres du cinéma des années 50 et c'est ainsi que Pennywise se transforme en momie, un loup-garou ou en créature du lac noir. 

Autre exemple, dans le film, Stan est terrorisé par une femme sur un tableau alors que, chez King, il est confronté à des cadavres de noyés. Attaqué par un loup-garou dans le livre, Richie a une phobie des clowns dans le film de 2017. De son côté, Mike doit revivre la mort de ses parents, brûlés dans un incendie criminel, alors que, dans le livre, il frôle la mort en se faisant attaquer par un oiseau géant. Seuls le lépreux qui poursuit Eddie et le lavabo sanglant de Bev, présents dans le roman, sont conservés dans le film.

3. D'autres vies pour Mike Hanlon et Stanley Huris

Le passé et l'origine des personnages ont également été modifiés pour les besoins du film. Par exemple, dans le roman, la famille de Stan est juive mais pas vraiment pratiquante alors que, dans le film, le père de Stan est rabbin.

Mais, c'est certainement l'histoire de Mike qui a été la plus modifiée. Dans le film, les parents de Mike Hanlon sont morts brûlés dans un incendie criminel alors, que dans le roman, ils sont bel et bien vivants. Mike entretient d'ailleurs une relation forte avec son père et c'est même ce dernier qui lui transmet son savoir concernant Derry (à travers son album de photos). Dans le roman, Mike a donc un rôle de "guide" et d'historien de la ville et il est d'ailleurs celui qui, étant resté à Derry, rappelle les autres 27 ans après, au réveil de Pennywise. Dans le film de 2017, ce rôle d'éclaireur sur le passé de Derry semble dévolu à Ben. Attendons de voir ce qu'il en sera pour la suite...


"Lover"... Amants, vraiment ?

4. Une mythologie simplifiée

Dans le roman, la mythologie autour de Pennywise (et le Macroverse créé par King) est beaucoup plus développée tout comme les moyens ancestraux pour le combattre. Les enfants pratiquent d'ailleurs une cérémonie indienne pour avoir des visions et des indices sur leur ennemi. C'est ainsi qu'ils découvrent les origines ancestrales de Ça, ce dernier étant arrivé sur terre à l'époque préhistorique...

Les enfants ont ensuite recours au rituel de Chüd, un moment essentiel où Bill rencontre Maturin, une Tortue des temps anciens, grande ennemie de Pennywise, montrée d'ailleurs en clin d'oeil dans le film. On apprend alors que Ça peut être vaincu par une sorte de combat psychique basé sur la force de la volonté et de la croyance. Par exemple, dans le roman, les enfants croient que seul un objet en argent, comme dans les histoires de loup-garou, peut tuer Pennywise et ils mettent donc tout en oeuvre pour en fabriquer.

Par cette simple croyance, les balles d'argent - inexistantes dans le film et remplacées par le pistolet d'abattage de Mike - ont le pouvoir de blesser le Clown. De même, Eddie parvient à toucher Pennywise avec son simple inhalateur. Dans le film, ces armes "psychiques" et cet aspect fantastique sont oubliés au profit d'une bataille plus physique contre Pennywise. 

5. Beverly n'est pas kidnappée

Dans le film, Beverly est enlevée par Grippe-Sou juste après avoir vaincu son horrible père. Pour la sauver, ses amis se rendent dans les égouts et affrontent la créature pour la toute dernière fois (de leur enfance). Mais, dans le roman, Bev n'est pas kidnappée. Elle se retrouve avec tous les autres dans les égouts lorsqu'Henry parvient à les y emmener. Elle n'est donc pas en "lévitation" dans l'antre de Ça et n'a donc pas droit au "baiser d'amour véritable" de Ben pour la réveiller. 

6. Le destin réservé à Henry Bowers et sa bande

Très importants dans le roman, Henry Bowers et sa bande de dépravés le sont tout autant dans le film mais sont toutefois moins développés et leur destin est différent de celui que leur avait réservé King dans le livre. Ainsi, Patrick Hocksetter, l'acolyte d'Henry, qui meurt le premier, est, dans le livre, un très grand psychopathe qui tue des animaux.

Autre différence avec le livre : Henry Bowers n'est pas balancé dans le vide par Mike. Dans le roman, il survit au passage final dans les égoûts (mais perd la raison) et ce sont ses compères qui se font assassiner par Pennywise (Victor et Belch sont pourtant absents de cette scène finale). La survie d'Henry est d'ailleurs essentielle puisque c'est lui qui se fait ensuite accuser de tous les meurtres de la ville perpétrés par Pennywise. Devenu adulte, il est enfermé dans une institution psychiatrique de laquelle il s'échappe au retour de Ça. C'est pour cela qu'il est difficile de croire qu'Henry soit vraiment mort dans le premier film... 

7. La scène de sexe supprimée

Après que les membres du Club des ratés aient réussi à vaincre Ca, ils se perdent dans les égouts. Le roman de King évoque la force et le pouvoir qu'ils ont lorsqu'ils sont ensemble et c'est ainsi qu'à ce moment de l'histoire, ils réalisent qu'ils doivent se rassembler et se reconnecter à tout prix. Pour se réunir et survivre, Beverly fait alors l'amour avec chacun des garçons. Pour King, cet acte sexuel prématuré est une manière d'évoquer symboliquement la perte de leur innocence et de concrètement achever leur enfance pour les amener vers l'âge adulte et, donc, vers la suite du roman. 

Déjà absente de la minisérie de 1990, cette scène controversée a également été rayée, sans surprise, du film de 2017. Pour autant, dans la scène finale, on peut voir un plan sur le plâtre d'Eddie (avec Beverly en arrière-plan), où est inscrit "Lover" (amant) à la place de "Loser". Ce moment où les sept amis se tiennent la main après leur serment est certainement une référence ou une manière de détourner cette scène déroutante du roman.

Les références aux autres œuvres de Stephen King


Dick Hallorann de "Shining" est mentionné dans le roman "Ca"

En lisant le livre de Stephen King, on réalise également à quel point tous ses romans sont connectés. Essentiel dans son oeuvre, Ça est ainsi référencé dans plusieurs autres des ouvrages de King, permettant d'aller plus loin dans la compréhension de l'univers étendu de l'auteur. Ou simplement de trouver des clins d'oeil rigolos ! En voici quelques exemples...

Dans le roman 22/11/63, adapté en minisérie la saison passée, on a l'agréable surprise de voir le héros, venu du futur, se rendre dans le Derry de 1958, ville que l'auteur se permet d'obscurcir encore plus. Lors de son seul moment lumineux à Derry, Georges Amberson /Jake Epping fait ainsi la rencontre de Beverly et Richie ! A l'automne 1958, les deux amis dansent ensemble en musique et c'est ainsi que le nouveau héros de King leur donne un petit cours à sa manière.

La Tortue, présente dans le roman Ça, est également essentielle dans la mythologie de la grande saga de King, La Tour Sombre. 

Le roman Insomnie se déroule lui aussi à Derry. Mike Hanlon est d'ailleurs présent, mais'au second plan. 

Dans Misery, adapté au cinéma en 1990, le héros, un écrivain célèbre nommé Paul Sheldon, raconte que sa mère et une certaine "Mme Kaspbrak", qui pourrait donc être la mère d'Eddie, se sont rendues un jour à Boston. 

Le roman Ça se permet lui-même de faire des petits hommages à d'autres romans de Stephen King. Ainsi, Beverly, devenue adulte, raconte dans le roman que des meurtres ont été commis par un flic à Castle Rock. Il s'agit ici du Frank Dodd de Dead Zone. Quant à Will Hanlon, le père de Mike (mort dans le film), il raconte dans le livre que l'un de ses copains d'armée s'appelle Dick Hallorann, qui n'est autre que le chef cuisto de l'hôtel Overlook de Shining ! 

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