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À Majorque, le paradis des artistes est devenu un village fantôme

En Espagne comme ailleurs, c’est la crainte de la misère qui chasse généralement les habitants des zones rurales, mais dans ce village haut perché de l’île de Majorque, c’est tout le contraire : ici, c’est l’opulence qui fait fuir les locaux, rapporte The Guardian.

“La population de Majorque augmente, mais celle de Deià diminue “, regrette Lluís Apesteguia, le maire du village. À part un petit supermarché, tous les commerces ont disparu et le cabinet médical n’ouvre plus que deux heures par semaine. Car aujourd’hui, seuls les millionnaires peuvent se permettre de s’installer à Deià où la moindre maison désormais se vend plus de 2 millions d’euros.

Un scénario catastrophe déjà bien connu ailleurs

“Ce n’est plus qu’un village fantôme et un parc à thème”, constate amèrement Carmen Domènech, une Barcelonaise arrivée dans le village en 1974. À l’époque, Deià était encore le refuge des artistes et des intellectuels désargentés. Le romancier britannique Robert Graves l’avait découvert en 1929. Il s’y était installé avec sa famille parce que la vie y était bon marché et l’immobilier plus qu’abordable. Puis d’autres amateurs de calme étaient venus de l’étranger. Des Britanniques et des Américains (d’où l’intérêt de la presse anglo-saxonne pour ce qui se passe à Deià) mais pas seulement, précise Carmen Domènech.

“Entre eux et les locaux, les relations étaient bonnes. Vous pouviez vous asseoir au café et constater que Julio Cortázar, le romancier argentin, était assis à la table d’à côté. Mais Deià était encore un vrai village avec un boucher et un poissonnier.”

C’est en 1987 qu’un scénario catastrophe déjà bien connu ailleurs a commencé à se mettre en place au village. Charles Branson, le patron de Virgin, connaissait Deià grâce à des compatriotes. Cette année-là, il a obtenu un permis de construire pour ce qu’il avait d’abord présenté comme une résidence d’artistes. Mais La Residencia – aujourd’hui propriété de Bernard Arnault – n’était en réalité qu’un hôtel de luxe qui n’a pas attiré beaucoup de créateurs. En revanche, ses clients, séduits par le site exceptionnel, ont rapidement fait exploser les prix de l’immobilier. De quoi dissuader à la fois les vrais habitants des îles – dans une région où le salaire moyen plafonne à 1 500 euros mensuels – et les vrais artistes.

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