À cause de la météo, la moisson de blé s’annonce « catastrophique » cette année

Photo d’illustration de plants de blé prêts à être récoltés dans une ferme à Lèves, en Eure-et-Loir, le mercredi 12 juillet 2023.
Bloomberg / Bloomberg via Getty Images Photo d’illustration de plants de blé prêts à être récoltés dans une ferme à Lèves, en Eure-et-Loir, le mercredi 12 juillet 2023.

AGRICULTURE - Personne n’y a échappé, pas même les grains de blé. Ces derniers mois ont été particulièrement pluvieux dans l’hexagone, allant jusqu’à saper le moral de certains habitants. Mais ceux qui en pâtissent le plus sont probablement les agriculteurs, car à cause de cet excédent de pluie, la récolte de blé de l’année 2024 s’annonce particulièrement mauvaise. Elle pourrait même devenir la pire que la France n’ait jamais enregistrée depuis l’année 1983.

La céréale la plus produite en France enregistre cette année une moisson « catastrophique », a déclaré le président de la FNSEA Arnaud Rousseau, sur franceinfo, ce mercredi 7 août. Le représentant syndical estime qu’il y aura « entre 25 et 30 % de récolte en moins » cette année à cause « des conditions climatiques ». « C’est la première fois, depuis 40 ans, que la France a aussi peu de blé produit sur son territoire », a-t-il par ailleurs ajouté.

Des chiffres confirmés par les estimations du cabinet d’analyse Argus, spécialisé dans les marchés agricoles. Dans un communiqué publié mardi, l’entreprise estime que la production de blé français pourrait chuter au plus bas depuis 1983, une année marquée par une sécheresse sévère qui a lourdement touché le monde agricole.

« Les rendements de blé tendre sous les 60 quintaux par hectare (6 tonnes, NDLR) avaient disparu depuis la fin des années 80 en France. Mais les aléas climatiques nous ramènent en arrière. D’abord avec la très mauvaise récolte de 2016, qui avait enregistré 53,74 quintaux/hectare, et aujourd’hui avec celle de 2024 », a commenté le directeur d’Argus Media France, Gautier Le Molgat, dans un communiqué.

Un excédent de pluie, de l’hiver à l’été

Pour comprendre comment les récoltes en sont arrivées à un tel désastre, il faut remonter jusqu’à l’hiver dernier. En effet, selon les régions, les semis doivent être faits entre la mi-octobre et la mi-novembre. Or sur ces deux mois, les précipitations ont été excédentaires de plus de 30 % sur une grande partie de l’hexagone, selon Météo-France. Certains semis ont donc été gorgés d’eau, d’autres décalés dans le temps voire abandonnés… Selon Argus Media, les surfaces consacrées au blé ont ainsi reculé de 10,5 % cette année.

Mais la pluie ne s’est pas arrêtée en si bon chemin. Le printemps météorologique de 2024 (de mars à mai) a été « le plus pluvieux depuis 2008 », avec une anomalie de +45 % de précipitations, toujours selon Météo-France. Pire encore, ce printemps compte « parmi les moins ensoleillés, comparable aux printemps 2013 et 1983 ». Or, comme le souligne l’agro-météorologue Serge Zaka, ce type de printemps pluvieux favorise « l’asphyxie racinaire (le sol saturé d’eau empêche les racines de respirer correctement, ndlr) et des maladies ». Le déficit d’ensoleillement, lui, engendre « une baisse de la photosynthèse et du remplissage des grains ».

Enfin, même la période des moissons de fin juin à début août a été gênée par la météo, avec un excédent de pluies en juin et d’importants orages fin juillet. Moissonner par temps humide favorise la germination sur pied et dégrade globalement la qualité du blé.

Un lien avec le réchauffement climatique ?

Si le lien entre la mauvaise récolte de 2024 et le changement climatique ne peut être établi dès ce mois d’août, le dernier rapport de la Cour des comptes publié en mars indique qu’« en France, l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des évènements extrêmes – sécheresses ou précipitations en excès – est une menace pour les cultures, qui se combine avec la difficulté d’anticiper ces évènements ».

De telles perturbations météorologiques font également partie des conséquences évoquées dans le rapport spécial sur le changement climatique et les terres du GIEC, publié en 2019. « Ces événements peuvent entraîner des dommages aux cultures agricoles, réduire la qualité des sols, et perturber les systèmes de drainage et les infrastructures agricoles », indiquait le groupe d’experts dans ses conclusions.

Alors que la France enregistre une moisson médiocre en raison de la pluie, la récolte s’annonce également catastrophique en Italie. La Sicile, ancien grenier à blé de la Grèce et de la Rome antiques, est désormais menacée de désertification par le réchauffement climatique. Cette année, elle devrait voir ses récoltes s’effondrer en moyenne de plus de 50 %, selon la Coldiretti, principale association professionnelle du secteur agricole.

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