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Génocide arménien : l’une des pages les plus noires du XXe siècle

Silvard a 103 ans. Elle en avait trois en 1915. Elle vit à Erevan où sa famille s’est réfugiée après avoir échappé au massacre de son peuple grâce à des soldats français. Ses parents, sa soeur et elle seront donc sauvés, mais ses oncles, tantes et cousins seront tous tués. De son vivant, Silvard ne verra sans doute pas son voeu le plus cher exaucé : “Si les Turcs reconnaissaient le génocide des Arméniens, alors tous ces gens persécutés, leurs descendants, ceux qui ont dit au monde ce qui était arrivé pourraient rentrer chez eux, leur mission sera achevée.” Nous sommes en pleine Première guerre mondiale. La Turquie n’existe alors pas encore, c’est l’Empire Ottoman qui étend son influence jusqu’aux portes de la Russie et du Moyen-orient. A sa tête, un parti, le Comité Union et progrès, plus connu sous le nom de “Jeunes-Turcs” et un triumvirat d’officiers, qui vont organiser, planifier et exécuter un plan d‘élimination des Arméniens. Le 24 avril 1915, des milliers d’Arméniens, soupçonnés de sentiments nationaux hostiles au gouvernement central vont être arrêtés. La plupart d’entre eux seront ensuite exécutés ou déportés. La population arménienne d’Anatolie et de Cilicie est alors contrainte à l’exode vers les déserts de Mésopotamie. Un grand nombre d’entre eux seront tués en chemin ou dans des camps. Beaucoup seront brûlés vifs, noyés, empoisonnés ou victimes du typhus. Les Arméniens estiment que 1,5 million des leurs ont été tués de manière systématique. A ce jour, une vingtaine de pays ont reconnu le génocide arménien, parmi lesquels la France et la Russie. Le Parlement européen a fait la même démarche. Barack Obama qui, en 2008, lors de sa campagne électorale, avait promis de reconnaître le génocide, n’a jamais employé le mot. La Turquie rejette catégoriquement le terme, évoquant “une guerre civile en Anatolie, doublée d’une famine, dans laquelle 300 à 500.000 Arméniens et autant de Turcs ont trouvé la mort”. “Il n’y aucune tache sombre, aucune ombre qu’on puisse nommer génocide dans l’histoire de la Turquie”, a encore martelé le président turc, qui, l’an dernier, alors Premier ministre, avait pourtant fait un pas en avant inédit en présentant des condoléances aux victimes de 1915.