L'opposition boycotte les élections au Soudan

Préparation d'un bureau de vote à Khartoum. Les élections législatives et présidentielle qui ont débuté lundi au Soudan, et sont boycottées par les principaux partis d'opposition, devraient prolonger le long bail du président Omar Hassan al Bachir à la tête du pays. /Photo prise le 12 avril 2015/REUTERS/Mohamed Nureldin Abdallah

par Shadi Bushra et Khalid Abdelaziz KHARTOUM (Reuters) - Les élections législatives et présidentielle qui ont débuté lundi au Soudan, et sont boycottées par les principaux partis d'opposition, devraient prolonger le long bail du président Omar Hassan al Bachir à la tête du pays. Ces élections étalées sur trois jours sont les premières depuis la partition du Soudan du Sud, en 2011. Les bureaux de vote ont ouvert à 08h00 (05h00 GMT). Au pouvoir depuis un coup d'Etat islamiste mené en 1989 avec le soutien de l'armée, Bachir devrait obtenir un nouveau mandat, d'autant que les principaux partis d'opposition ont refusé de présenter des candidats, invoquant la répression dont sont victimes les partis, les médias et la société civile. Au final, les 13 millions d'électeurs inscrits ont le choix entre le Parti du congrès national (NCP) de Bachir et une poignée de formations politiques relativement récentes dont l'opposition classique estiment qu'elles ne diffèrent pas vraiment du pouvoir en place sur les questions centrales de la sécurité ou de l'économie. L'Union européenne, qui avait envoyé une mission d'observation pour les élections de 2010, a critiqué l'environnement politique du scrutin, déplorant l'absence de dialogue national véritable et de processus politique inclusif. "Le peuple soudanais mérite mieux. Nous avons par conséquent choisi de ne pas nous engager dans un soutien à ces élections", a déclaré jeudi la Haute Représentante de l'UE pour la politique étrangère et de sécurité commune, Federica Mogherini. Pour sa part, Omar Hassan al Bachir, premier président en exercice visé par un mandat d'arrêt délivré par la Cour pénale internationale, a mené campagne sur l'amélioration de l'économie soudanaise. Au nom de la stabilité dans une région où, de la Libye au Yémen, les foyers de déstabilisation sont nombreux, il a également mis en garde contre le risque d'une alternance et se présente, à 71 ans, comme le seul rempart à même de protéger le pays de troubles semblables. "Il y a ceux qui veulent faire au Soudan ce qui s'est produit au Yémen, en Syrie et en Libye, mais nous ne permettrons pas que cela se passe au Soudan", a-t-il dit lors d'un rassemblement électoral à Kadugli, la capitale de l'Etat de Sud-Kordofan. Les forces de sécurité soudanaises sont aux prises avec les insurgés du Darfour depuis 2003 et les rebelles du Mouvement populaire de libération du Soudan–Nord (MPLS/Nord) opérant depuis 2011 le long de la frontière avec le Soudan du Sud. "Le maintien de Bachir au pouvoir est une menace bien plus grande que la démocratie", a dénoncé Jebril Bilal, du Mouvement rebelle pour la justice et l'égalité (JEM). "Les morts au Darfour, dans le Sud-Kordofan et dans l'Etat du Nil bleu sont bien plus nombreux que les morts dans les pays du 'printemps arabe'", a-t-il ajouté. (Henri-Pierre André pour le service français)