Londres ne frappera pas en Syrie, Obama consulte

par Andrew Osborn et Oliver Holmes LONDRES/BEYROUTH (Reuters) - La Grande-Bretagne ne participera pas à une éventuelle intervention militaire contre la Syrie après le cinglant revers que les députés britanniques ont infligé jeudi soir au Premier ministre David Cameron, entravant aussi les efforts conduits par les Etats-Unis pour répondre à l'usage d'armes chimiques près de Damas. Par 285 voix contre 272, la Chambre des communes a rejeté le "principe" d'une action armée en Syrie. "Il est tout à fait clair ce soir, alors que la Chambre n'a pas adopté cette motion, que le Parlement britannique, reflétant l'opinion du peuple britannique, ne veut pas d'une action militaire britannique: j'ai reçu le message, et le gouvernement agira en conséquence", a aussitôt réagi le Premier ministre britannique. Son secrétaire à la Défense, Philip Hammond, a confirmé que l'armée britannique ne serait pas engagée dans une éventuelle opération militaire contre le régime de Bachar al Assad. "Je ne m'attends pas à ce que la non-participation britannique stoppe une intervention", a-t-il dit devant les caméras de la BBC. Mais la décision découlant du vote à Westminster "pèsera sans doute sur la relation spéciale" qui existe entre Londres et Washington, a-t-il ajouté. "PAS DE CALENDRIER, PAS DE STRATÉGIE" À Washington, précisément, la Maison blanche a pris note du retrait de son allié britannique en soulignant que Barack Obama prendrait sa décision "au mieux des intérêts des Etats-Unis". Lors d'une conférence téléphonique avec des élus du Congrès, plusieurs responsables de haut rang de l'administration américaine, parmi lesquels le secrétaire d'Etat John Kerry, le secrétaire à la Défense Chuck Hagel et la conseillère nationale à la sécurité Susan Rice, ont fait passer le message: "le président fera ce qu'il pense servir au mieux les intérêts du peuple américain, sans se soucier de ce que d'autres pays pourraient faire ou ne pas faire", selon les propos rapportés par un élu démocrate qui participait à ce briefing. Eliot Engel a ajouté que l'administration américaine "n'avait aucun doute sur le fait que des armes chimiques ont été utilisés et que c'est le régime Assad qui les a utilisées". Parmi les éléments étayant cette certitude figurent notamment des écoutes de communications entre responsables syriens de haut rang. Mais le sénateur républicain James Inhofe a confié qu'il n'avait pas été convaincu. "Ce soir, a-t-il dit, l'administration nous a informés qu'elle disposait d'une 'vaste gamme d'options' pour la Syrie mais n'a pas pu exposer une seule option. Elle n'a pas non plus présenté de calendrier, de stratégie pour la Syrie et le Moyen-Orient ni de plan de financement d'une telle option." Les perspectives d'une frappe imminente semblent de toute façon s'être éloignées, au moins jusqu'à samedi, lorsque les experts en armes chimiques de l'Onu quitteront la Syrie après s'être rendus sur les lieux où, selon l'opposition syrienne, les forces de Bachar al Assad ont gazé des civils dans leur sommeil le 21 août dernier. "UNE ACTION TRÈS DISCRÈTE ET LIMITÉE" De plus, la Maison blanche, rendant compte d'une conversation téléphonique entre Barack Obama et la chancelière allemande Angela Merkel, a souligné qu'une intervention en Syrie ne serait nullement comparable à ce qui s'est passé en 2003 en Irak. "Ce dont nous parlons ici, c'est d'une action très discrète et limitée", a rapporté le porte-parole de la présidence, Josh Earnest, balayant la possibilité d'un conflit "ouvert" visant à parvenir à un changement de régime à Damas. De leur côté, Angela Merkel et le président français François Hollande ont espéré jeudi "une fin rapide de la mission d'enquête de l'Onu et un rapport immédiat au Conseil de sécurité des Nations unies de façon à ce qu'il puisse s'acquitter de sa responsabilité en ce qui concerne ce crime monstrueux". Au rang des soutiens de Damas, la Chine a réaffirmé vendredi qu'on ne pouvait contraindre le Conseil de sécurité des Nations unies à agir sur la Syrie tant que cette enquête ne serait pas achevée. Pour la deuxième fois en deux jours, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité se sont réunis jeudi au siège new-yorkais des Nations unies mais leurs échanges ont été une nouvelle fois infructueux. Les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne estiment de toute façon que la Russie et la Chine opposeraient probablement leur veto à tout projet de résolution, comme elles l'ont fait à trois reprises déjà depuis le début de la crise syrienne, en mars 2011. Et les Occidentaux jugent possible d'agir avec ou sans résolution du Conseil de sécurité. De sources diplomatiques occidentales, on explique vouloir provoquer un vote au Conseil de sécurité de manière à isoler Moscou et Pékin et former une "coalition des volontaires" qui seraient prêts, eux, à réagir. avec Matt Spetlanick et Patricia Zengerle à Washington, Erika Solomon à Beyrouth, Khaled Yacoub Oweis à Amman, Sarah Marsh à Berlin, Louis Charbonneau et Michelle Nichols aux Nations unies; Henri-Pierre André pour le service français