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Les propositions sur la pénibilité accueillies prudemment

Les bases de la mise en oeuvre du compte pénibilité ont reçu mercredi un accueil plutôt favorable des syndicats mais n'ont en rien levé les inquiétudes du patronat, fermement opposé à ce volet majeur de la réforme des retraites. /Photo d'archives/REUTERS

par Gregory Blachier PARIS (Reuters) - Les bases de la mise en oeuvre du compte pénibilité ont reçu mercredi un accueil plutôt favorable des syndicats mais n'ont en rien levé les inquiétudes du patronat, fermement opposé à ce volet majeur de la réforme des retraites. Une synthèse d'étape a été remise aux partenaires sociaux par le chargé de mission Michel de Virville afin de susciter leurs réactions et poser les fondations du mois de dialogue à venir, le texte définitif devant être prêt fin avril. Si Force ouvrière ou la CFDT saluent un document clair qui laisse la place à la négociation, le patronat souligne qu'il ne répond à aucune de ses préoccupations dont la principale, le coût du dispositif, sera discutée au niveau gouvernemental. La réforme des retraites prévoit un "compte personnel de prévention de la pénibilité" qui permettra, par un système de points, de partir à la retraite plus tôt - deux ans maximum - à taux plein, de bénéficier d'un temps partiel ou de formation. Il sera financé par une cotisation supplémentaire pour toutes les entreprises pouvant aller jusqu'à 0,2% et une autre, "spécifique" et comprise dans une fourchette large, que devront acquitter les entreprises dont les employés sont concernés. Ce "C3P" doit entrer en vigueur au 1er janvier 2015 et ses modalités seront fixées par décret. Le patronat s'y oppose farouchement depuis le départ, tant à cause des cotisations que de la multiplication des normes en matière de santé au travail. Le président du Medef, Pierre Gattaz, estimait en octobre qu'on "(allait) droit vers un système à la Kafka". Michel de Virville a dit avoir ébauché un système "qui puisse être appliqué par des patrons de PME avec des choses qui leur parlent". Mais la première phase de consultations et sa synthèse n'ont pas rassuré Geneviève Roy, vice-présidente de la CGPME, le syndicat du patronat des petites et moyennes entreprises. "Nos inquiétudes, qui étaient fortes sur le coût, la complexité administrative, le contentieux qu'elle génère et le fait que la prévention (de la pénibilité) soit mise à mal, demeurent", a-t-elle dit à Reuters. LA PRÉVENTION PAS ASSEZ TRAITÉE Michel de Virville, ancien haut responsable du Medef, a pourtant voulu "faciliter" la tâche des employeurs. Sa synthèse, qui est un document de travail et aura sans doute été largement modifiée d'ici fin avril, suggère un "référentiel" commun à tous les métiers et définit des seuils de mensuels pour dix facteurs - bruit, travail de nuit, etc. Si les patrons rejettent l'idée de mensualisation, avec la crainte qu'elle entraîne autant de démarches en plus, Michel de Virville a rappelé qu'en cas de risque régulier, une déclaration annuelle suffirait. La simplicité et la place laissée au dialogue séduisent en revanche les syndicats : "Il est concis, assez intéressant. On ne s'est pas perdu alors que le sujet est complexe", juge Jean-Louis Malys, chargé des retraites à la CFDT. "La simplicité, c'est un atout qui permet de mettre en place le dispositif. Il n'est pas gravé dans le marbre." Lui comme Philippe Pihet, de FO, ont toutefois des réserves sur le fond, à commencer par les dispositions pour les salariés de 59,5 ans et plus - il est prévu à cet âge de doubler les points acquis, ce que le second trouve "trop timide". FO explique en outre que le "référentiel" proposé présente des risques de remise en cause d'acquis - les heures de nuit, par exemple, divergent de celles prévues par le droit -, et voit encore d'autres points à éclaircir ou améliorer. Et syndicats et patronat, qui ne négocient pas directement ce texte, se retrouvent sur la question de la prévention, pas suffisamment traitée selon eux. Pour la CGPME, les efforts déjà réalisés devraient être pris en compte financièrement, alors que la CFDT espère des gains en matière de prévention quand un risque est identifié. Ils ont un mois pour se faire entendre. (Edité par Yves Clarisse)