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Le SPD allemand ouvre la porte à son entrée au gouvernement

par Erik Kirschbaum et Sarah Marsh BERLIN (Reuters) - Les sociaux-démocrates allemands du SPD semblent prêts à rejouer le scénario de la "grande coalition" gauche-droite avec Angela Merkel après avoir renoncé ce week-end à la hausse de la fiscalité qu'ils réclamaient pendant la campagne électorale. Deux semaines après avoir perdu les législatives face aux conservateurs CDU-CSU d'Angela Merkel, le SPD ne parle plus de façon désobligeante de l'idée de devenir le partenaire minoritaire dans un gouvernement de grande coalition comme cela fut le cas lors du premier mandat de Merkel, de 2005 à 2009. Vendredi, après une première réunion avec la chancelière et les dirigeants de la CDU-CSU, le président du SPD, Sigmar Gabriel, et ses alliés ont expliqué qu'un relèvement de la tranche supérieure de l'impôt sur le revenu n'était pas gravé dans le marbre si le camp conservateur proposait d'autres moyens pour financer les infrastructures et l'éducation. Pendant la campagne électorale, le SPD avait promis s'il revenait au pouvoir de faire passer la tranche supérieure de l'impôt sur le revenu de 42% à 49% pour les foyers ayant des revenus annuels supérieurs à 100.000 euros. "Pour nous, la hausse des impôts n'est pas une fin en soi", a déclaré Sigmar Gabriel. "Si la CDU-CSU ne le veut pas, elle doit expliquer quelle alternative il y a pour financer ce travail". "Je préférerais voir le SPD dans un gouvernement à faire de la politique qu'à l'extérieur à regarder." DILUTION De tels propos tranchent sur ceux tenus par les dirigeants du SPD juste après les élections du 22 septembre. A l'époque, ils avaient même demandé à Angela Merkel de penser à une alliance avec les Verts. Reste à savoir si la base du SPD, qui sera consultée sur tout projet de participation au gouvernement, est en harmonie avec la direction et si les 472.000 membres du parti donneront leur aval à une grande coalition. La grande peur des militants du SPD est en effet de voir leur identité encore un peu plus diluée en partageant le pouvoir avec une Angela Merkel particulièrement populaire. Les conservateurs ont obtenu 311 sièges dans le nouveau Bundestag, qui compte 630 députés, contre 192 au SPD. Les Verts ont 63 sièges et Die Linke, la gauche radicale, 64, soit un siège de plus que les écologistes, mais aucun grand parti n'envisage une alliance avec Die Linke. Les dirigeants de la CDU-CSU auront jeudi des consultations avec Les Verts, qui auront préalablement élu leur nouveau dirigeant, mardi. Une seconde réunion est prévue lundi prochain avec le SPD. Il s'agit là de discussions exploratoires. Les négociations en bonne et due forme avec le SPD et les Verts pourraient commencer mi-octobre et durer un mois ou plus. CONCURRENTS "C'est surprenant de voir le SPD si impatient d'être dans le prochain gouvernement", note Gero Neugebauer, professeur en sciences politiques à l'Université libre de Berlin. "Mais ce ne sera pas facile pour Gabriel de vendre cela à sa base." Pour Thomas Jäger, professeur de sciences politiques à l'université de Cologne, les dirigeants du SPD ont changé parce qu'ils ont compris que leurs alliés traditionnels, les Verts, étaient désormais en compétition avec eux pour le pouvoir. "Si les Verts avaient refusé de parler à Merkel, le SPD aurait eu davantage la main", estime-t-il. "Maintenant, ils sont concurrents. Les dirigeants du SPD veulent être au pouvoir. Il reste à voir s'ils peuvent persuader les membres (du parti) que c'est la bonne décision." Les Verts et le SPD, qui ont gouverné ensemble entre 1998 et 2005, sont toutefois conscients de la possibilité qu'Angela Merkel joue les deux partis l'un contre l'autre pour obtenir le meilleur accord possible pour la coalition qu'elle dirigera. "La probabilité d'une coalition avec les Verts est passée ces derniers jours de 'théorique' à "concevable'", a déclaré ce week-end le ministre conservateur de l'Environnement Peter Altmeier au magazine Der Spiegel. Il est loin le temps où la CDU qualifiait les Verts de dangereux extrémistes. "Nous n'avons pas plus de différences avec les Verts qu'avec le SPD", a ainsi déclaré au magazine Focus Armin Laschet, vice-président de la CDU et membre de son aile progressiste. Il a souligné que la question du nucléaire, qui avait pendant longtemps divisé les Verts et la CDU-CSU, n'a plus lieu d'être, la chancelière ayant décidé de sortir du nucléaire en réaction à la catastrophe de Fukushima au Japon en mars 2011. Les Verts ont en outre voté toutes les mesures présentées par Angela Merkel pour lutter contre la crise de l'euro. En au niveau local, les Verts ont déjà travaillé avec le camp conservateur. Ils ont dirigé Hambourg avec la CDU jusqu'en 2011. Danielle Rouquié pour le service français, édité par Gilles Trequesser