Publicité

Le lent déclin des climato-sceptiques en France

PARIS (Reuters) - La notion de réchauffement climatique causé par les activités humaines fait son chemin en France mais la bataille de l'opinion n'est pas encore gagnée, à en juger par une étude publiée jeudi par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie. Cette publication intervient à neuf mois de la conférence des Nations unies sur le climat qui se tiendra en décembre à Paris, pour adopter un programme de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) jugées responsables du phénomène. Le réchauffement climatique est placé en tête des problèmes d'environnement les plus préoccupants par 24% des Français interrogés, devant la pollution de l'air (20%) et de l'eau (17%). Ils n'étaient que 19% à émettre cette opinion en 2005. La majorité de l'opinion (52%) s'est faite à l'idée que ce phénomène était à l'origine des tempêtes et inondations hors norme qui défrayent régulièrement la chronique, au lieu de 32% en 2001. Ils ne sont que 20% à invoquer des causes naturelles. Pour 51% des sondés, il ne sera probablement pas possible de limiter le réchauffement à des niveaux acceptables d'ici la fin du siècle et 55% pensent que ces dérèglements rendront les conditions de vie extrêmement pénibles. Une partie non négligeable de l'opinion (43%) juge au contraire possible de s'adapter aux modifications du climat. Les Français semblent avoir largement tranché la querelle scientifique autour des rapports alarmants du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC). Ils sont 63% à juger que ses thèses sur le rôle des GES dans le réchauffement est désormais une certitude pour la plupart des scientifiques contre 37% d'un avis inverse. Et 72% pensent que ce phénomène est dû aux activités humaines. De même, ils ne sont que 31% à juger que les climatologues exagèrent, contre 68% pour qui ces scientifiques évaluent au contraire correctement les risques. Ils étaient cependant plus nombreux de cet avis en 2011 (72%). QUESTION D'ÂGE Selon l'Ademe, l'échec du sommet de Copenhague sur le climat en 2009 et la crise économique de 2008-2010 "ont affaibli la crédibilité de l'enjeu climatique dans le public". C'est en 2007 que l'Agence de l'environnement a ainsi enregistré le plus grand nombre de Français plaçant le réchauffement climatique en tête des problèmes environnementaux (33%), avant un recul sensible dans les années 2010 à 2013. Outre cette relative instabilité, d'autres indices montrent que la bataille de l'opinion est encore à gagner. L'emploi est plus que jamais en tête des préoccupations des Français -- pour 37% des sondés en 2013 et 35% en 2014 -- suivi par la dette et les déficits publics (14% en 2014) et les impôts (12%). Seuls 2% des sondés placent l'environnement en tête. Certes, le sentiment que des changements importants sont inéluctables pour s'adapter aux conditions climatiques domine. Ainsi, 57% des personnes interrogées (61% en 2007 et 2009) estiment qu'il faudra profondément modifier les modes de vie et 77% qu'il faudra développer les énergies renouvelables. Mais ils ne sont que 15% à dire qu'ils pourraient utiliser facilement les transports en commun au lieu de la voiture. L'âge est cependant une variable majeure de la façon dont est perçu le réchauffement climatique, les jeunes générations s'y montrant beaucoup plus sensibles que les seniors. Un indicateur synthétique montre qu'il y a en France, sur ce sujet, 44% de convaincus, 12% de sceptiques et 44% d'hésitants. Le pourcentage de convaincus monte à 62% chez les 15-17 ans et tombe à 39% chez les 50-69 ans. Les agriculteurs sont les plus nombreux à être hésitants (60% contre 20% de convaincus) et c'est chez les cadres et les professions intellectuelles que l'on trouve le plus grand nombre de convaincus (52%) et le plus faible taux de sceptiques (7%). (Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)