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Paris veut se rassurer après l'échec du Rafale au Brésil

par Cyril Altmeyer PARIS (Reuters) - La France cherche à se rassurer jeudi au lendemain de l'échec du Rafale au Brésil face au Gripen du suédois Saab , un contrat espéré de longue date, d'autant plus crucial que Paris compte sur au moins deux commandes à l'export de l'avion de chasse pour boucler son budget de défense d'ici 2019. Dassault Aviation est sanctionné en Bourse, mais le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a souligné que le Brésil n'était pas une cible prioritaire pour le Rafale, présélectionné par l'Inde pour des négociations sur un contrat géant qui durent depuis près de deux ans. Le PDG de l'avionneur Eric Trappier a déclaré à Reuters être "assez confiant" sur la signature de ce contrat en Inde estimé à 15 milliards de dollars et portant sur 126 avions. "Je suis optimiste sur le fait qu'on va finaliser (le processus), mais je ne peux pas vous dire si ce sera avant ou après les élections" dont la date n'a pas encore été fixée, a-t-il dit lors d'un entretien téléphonique." Le Rafale, qui n'a jamais été exporté depuis son lancement en 1989, semblait avoir le vent en poupe au Brésil sous la présidence de Lula tandis que Nicolas Sarkozy avait promis des transferts de technologies massifs pour emporter le contrat portant sur au moins 36 appareils. Mais à son arrivée au pouvoir, la présidente brésilienne Dilma Rousseff a remis à plat le processus, sans cesse retardé, avant que les révélations sur les espionnages dont elle a fait l'objet de la part des Etats-Unis scelle le sort du troisième concurrent, l'américain Boeing. Le deuxième échec d'affilée du Rafale face au Gripen suédois, quelques mois après la Suisse, souligne les dégâts de la concurrence fratricide de trois avions de chasse européens dans les appels d'offres mondiaux, le troisième étant l'Eurofighter, coentreprise entre EADS, l'italien Finmeccanica et le britannique BAE Systems. Cette déconvenue illustre aussi la malédiction qui frappe un avion aux performances reconnues, encore récemment en Libye et au Mali, mais jugé trop cher pour les besoins de certains prospects. "Le Brésil a fait un choix économique avec l'avion suédois. Il va falloir que la France finisse par comprendre que le Rafale est trop cher et que la qualité de l'appareil n'entre pas dans les décisions actuellement. Avec ce nouvel échec, le contrat en Inde devient désormais crucial pour Dassault", commente un vendeur actions parisien. L'armée de l'air brésilienne doit désormais ouvrir des négociations avec Saab pour finaliser sa commande. Le groupe suédois livrera 36 Gripen, pour un montant de 4,5 milliards de dollars (3,3 milliards d'euros), mais l'accord générera des milliards de dollars supplémentaires en livraisons futures et en contrats de service. ESPOIRS SUR L'ASIE L'échec du Brésil complique à première vue l'équation budgétaire prévue dans la loi de programmation militaire (LPM) qui ne prévoit la livraison à la France que de 26 Rafale sur la période 2014-2019. Au rythme actuel de 11 avions livrés par an, en deçà duquel Dassault Aviation estime le programme non réalisable, l'export devra prendre le relais dès 2016. Le gouvernement a toutefois prévu de faire le point d'ici la fin 2015 si ses ambitions à l'export ne se concrétisaient pas. "Le Brésil n'était pas notre cible prioritaire", a assuré sur Europe 1 le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian. "Nous avons de bonnes raisons de croire que sur l'Inde et sur le Golfe, il y aura bientôt des résultats." Outre l'Inde, Paris compte particulièrement sur les Emirats arabes unis, le Qatar et la Malaisie, situés dans des zones où un avion plus cher mais plus performant pourrait être privilégié. Eric Trappier n'a pas souhaité faire de commentaire sur l'avancée de ces dossiers, tout en citant plusieurs autres prospects en ligne de mire, mais à un stade "très amont". Le titre Dassault Aviation, dont le flottant ne représente que 3% de son capital, perdait 2,17% à 900 euros vers 13h20, après avoir ouvert en baisse de plus de 7%, tandis que le SBF 120 gagnait 1,1% au même moment. Dans le même temps, Saab s'envole de près de 30% à la Bourse de Stockholm. Avec Alexandre Boksenbaum-Granier, édité par Jean-Michel Bélot