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L'avion malaisien aurait continué à voler après sa disparition

par Eveline Danubrata et Niluksi Koswanage KUALA LUMPUR (Reuters) - L'armée malaisienne pense que le Boeing 777 disparu samedi avec 239 personnes à bord a volé pendant plus d'une heure après avoir disparu des écrans radar, ce qui écarterait la thèse d'une désintégration. L'appareil aurait en outre changé de trajectoire pour mettre le cap à l'ouest vers le détroit de Malacca, loin de l'endroit où il a adressé son dernier signal aux contrôleurs aériens civils, dit-on de source militaire à Kuala Lumpur. L'avion de la compagnie Malaysia Airlines, qui avait décollé de la capitale malaisienne à destination de Pékin, a disparu samedi vers 01h30 locale (vendredi 17h30 GMT). Les recherches auxquelles une dizaine de pays contribuent n'ont pas permis d'en retrouver trace. L'hypothèse d'un acte terroriste semble peu étayée, selon les enquêteurs. Au moment de sa disparition, le Boeing 777 se trouvait à mi-chemin de la ville de Kota Bharu, sur la côte orientale malaisienne, et la pointe sud du Vietnam, à une altitude de 35.000 pieds (10.670 mètres). "Il a changé de direction après Kota Bharu et volé à plus basse altitude. Il est allé vers le détroit de Malacca", a dit un responsable militaire à Reuters. Le détroit de Malacca, à l'ouest de Kuala Lumpur, sépare la Malaisie continentale de l'île indonésienne de Sumatra. Or, l'appareil avait pris après son décollage la direction du nord-est pour se rendre en Chine. D'après le chef d'état-major de l'armée de l'air Rodzali Daud, cité mardi par un journal malaisien, le Boeing a été détecté pour la dernière fois par un radar militaire à 02h40 samedi (vendredi 18h40 GMT) près de l'îlot de Pulau Perak, dans le nord du détroit de Malacca. Il volait alors à 9.000 mètres, ajoute-t-il. "Cette information est en train d'être vérifiée par le département de l'Aviation civile et l'équipe chargée des recherches", a a-t-on indiqué de source proche de l'enquête. "Il y a beaucoup d'autres informations du même genre." L'heure donnée par Rodzali signifie que le vol MH370 aurait volé une heure et dix minutes à une altitude de croisière après avoir disparu des écrans de contrôle, sur une distance d'environ 500 km, avec un transpondeur éteint. La Malaisie a étendu au détroit de Malacca ses recherches jusqu'ici limitées à la mer de Chine du Sud. La Chine, qui compte 154 ressortissants parmi les passagers, a mis à contribution dix satellites qui s'ajoutent aux dizaines de navires et avions mobilisés. HYPOTHÈSES Aucun signal de détresse n'a été envoyé et aucun problème n'a été signalé par radio. En l'absence de débris ou donnée de vol, la police malaisienne passe au peigne fin la liste des passagers en échafaudant toutes les hypothèses: sabotage, détournement, panne mécanique. "Peut-être que quelqu'un sur le vol a contracté une très forte assurance pour en faire profiter sa famille, ou alors quelqu'un qui devait beaucoup d'argent. Nous étudions toutes les possibilités", a déclaré le chef de la police Khalid Abu Bakar lors d'une conférence de presse. "Nous regardons très minutieusement les images de surveillance de l'aéroport de Kuala Lumpur, nous examinons le comportement de tous les passagers." Le fait que deux passagers aient voyagé sous une fausse identité a un moment fait songer à une action malveillante mais les vérifications effectuées par les enquêteurs fragilisent fortement la piste terroriste. Selon Interpol, les deux hommes ont utilisé des passeports iraniens pour un vol entre Doha et Kuala Lumpur ont ensuite utilisé des passeports volés à des ressortissants italien et autrichien en 2012 et 2013 pour le vol Kuala Lumpur-Pékin. Ils étaient âgés respectivement de 18 et 29 ans. "Plus nous recevons d'informations, plus nous sommes enclins à conclure que ce n'est pas un incident terroriste", a dit lors d'une conférence de presse le secrétaire général de l'organisation policière basée à Lyon, Ronald K. Noble. "L'un d'eux se rendait à Francfort pour retrouver sa mère, il s'agit d'un trafic d'êtres humains et non pas de terrorisme", a expliqué le secrétaire général. "On a pu savoir, auprès de ceux qui connaissaient ces personnes, qu'ils cherchaient un statut de réfugié à la recherche d'une vie meilleure, on a ainsi pu exclure une intention criminelle." Khalid Abu Bakar a aussi estimé que le plus jeune des deux "n'est probablement pas membre d'un quelconque groupe terroriste. Nous pensons qu'il essayait d'émigrer en Allemagne." Sa mère l'attendait à Francfort et a contacté les autorités, a dit le chef de la police. En Thaïlande, où les passeports ont été volés et les billets d'avion réservés pour les deux hommes, la police a dit également ne pas penser que ces derniers avaient un lien avec la disparition de l'avion. La compagnie aérienne a quant à elle dit prendre au sérieux le témoignage d'une Sud-Africaine, qui assure, images à l'appui, avoir été invitée par le co-pilote à s'asseoir dans le cockpit avec une amie lors d'un vol qui a eu lieu il y a deux ans. "Malaysia Airlines a pris connaissance des allégations proférées contre le co-pilote Farid Ab Hamid et nous les prenons très sérieusement. Nous sommes choqués par ces allégations. Nous n’avons aucune confirmation de la validité des images et vidéos de l’incident allégué", souligne-t-elle dans un communiqué. (Julien Dury, Eric Faye, Jean-Stéphane Brosse et Jean-Philippe Lefief pour le service français)