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L'armée sri-lankaise à nouveau accusée de crimes de guerre

Lors d'une parade militaire à Colombo. Selon une ONG australienne, les forces gouvernementales du Sri Lanka se sont rendues coupables de la plupart des crimes commis dans les derniers mois de la guerre civile et ont peut-être détruit systématiquement des preuves de massacres. /Photo d'archives/REUTERS/Dinuka Liyanawatte

SYDNEY (Reuters) - Les forces gouvernementales du Sri Lanka se sont rendues coupables de la plupart des crimes commis dans les derniers mois de la guerre civile et ont peut-être détruit systématiquement des preuves de massacres, affirme une ONG australienne dans un rapport publié jeudi. Le Sri Lanka a été le théâtre d'un long conflit de 26 ans entre les forces de Colombo et les séparatistes tamouls des Tigres de libération de l'Eelam Tamoul (LTTE). Plus de 100.000 personnes ont été tuées entre 1983 et 2009 et des milliers de personnes, principalement des Tamouls, sont toujours portées disparues. Le conflit s'est achevé dans un bain de sang. D'après l'Onu, 40.000 civils tamouls ont été tués dans les derniers mois du conflit, qui s'est terminé en mai 2009 après l'écrasement des forces séparatistes et la mort de leur chef, Velupillai Prabhakaran. Les chiffres sont contestés par Colombo. "Même si des violations ont été commises de part et d'autre, les preuves matérielles indiquent que des membres des Forces sri-lankaises de sécurité ont commis l'immense majorité des crimes présumés sur la période étudiée", écrit le Public Interest Advocacy Centre (PIAC), une organisation indépendante de défense de la démocratie. Le rapport du PIAC s'appuie sur des récits de témoins qui font état de tirs d'artillerie délibérés contre des hôpitaux, de viols et violences sexuelles, de tortures et d'assassinats de combattants tamouls qui s'étaient rendus aux forces régulières. Un témoin cité dans le rapport affirme que des dizaines de fosses communes où des civils avaient été inhumés ont été systématiquement détruites après la fin du conflit. "L'ÎLE DE L'IMPUNITÉ" Si ces faits étaient prouvés devant un tribunal, ils pourraient conduire à la condamnation de hauts responsables militaires et politiques du Sri Lanka, poursuit le rapport intitulé "L'île de l'impunité". Sa publication intervient alors que le Conseil des droits de l'homme de l'Onu sera saisi le mois prochain, à l'initiative des Etats-Unis, d'un projet de résolution appelant le gouvernement sri-lankais à faire toute la lumière sur l'offensive finale de 2009. Porte-parole de l'armée sri-lankaise, Ruwan Wanigasooriya a jugé le rapport sans fondement. Il a également mis en doute la véracité des témoignages recueillis et les affirmations selon lesquelles les militaires auraient effacé les traces de leurs crimes. "Croyez-vous que nous pourrions avoir déterré les ossements dans les villages où la population s'est aujourd'hui réinstallée et détruit des preuves?" a-t-il dit. Le Sri Lanka, qui conteste le bilan avancé par les Nations unies, s'oppose à une enquête internationale. Amnesty International a estimé que le rapport du PIAC confortait ses propres conclusions ainsi que celles de l'Onu. "Une enquête internationale doit être ouverte sans retard", a déclaré Polly Truscott, directrice adjointe d'Amnesty pour la région Asie-Pacifique. A la fin de l'année dernière, le Premier ministre britannique, David Cameron, s'est également prononcé en faveur d'une commission d'enquête internationale indépendante. Thuy Ong, avec Ranga Sirilal et Shihar Aneez à Colombo; Henri-Pierre André et Jean-Stéphane Brosse pour le service français