Hugo Chavez et Fidel Castro, une alliance mutuellement indispensable

Depuis ses débuts en politique, le dirigeant révolutionnaire cubain Fidel Castro a fait figure de mentor pour Hugo Chavez, décédé mardi 5 mars des suites d'un cancer à 58 ans, un soutien récompensé par un appui indéfectible du Venezuela à l'économie anémiée de l'île, grâce principalement à la fourniture de pétrole. Deux décennies durant, les deux hommes ont été des amis, des alliés, des confidents, se soutenant inconditionnellement, tant au plan intérieur que sur la scène internationale, au point que Hugo Chavez a proposé d'unir leurs deux pays dans une fédération, une idée refusée par ses compatriotes lors d'un référendum en 2007. "Fidel est pour moi un père, un compagnon, un maître en stratégie (...) Nous devons tout deux remercier la vie de nous être connus", déclarait en 2005 le président vénézuélien dans un entretien au quotidien officiel cubain Granma. Fidel Castro a repéré le jeune lieutenant-colonel parachutiste, de 28 ans son cadet, lors de sa tentative de coup d'Etat en 1992 contre les vieux partis et l'oligarchie vénézuélienne. Gracié après deux ans de prison, Chavez a été invité à La Havane et reçu par Castro comme un chef d'Etat. Depuis le triomphe de la Révolution cubaine en 1959, Castro a toujours marqué un intérêt particulier pour le Venezuela, voisin riche en pétrole (selon l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, le pays détient les plus importantes réserves de brut au monde). Pour Cuba, "le Venezuela a toujours été très important en termes géopolitiques, parce qu'il a ce que l'île n'a pas: du pétrole et des sources d'énergie", explique à l'AFP l'historien et écrivain Angel Lombardi, pour qui Castro n'a pas raté l'opportunité d'un rapprochement. "Fidel a toujours mis à profit les situations politiques à l'étranger pour accroître son influence dans la région. Un putschiste entrait parfaitement dans ce schéma", poursuit-il. La convergence idéologique ne s'est pas faite immédiatement, mais Castro a profité de ce que Chavez "n'avait aucune formation et était un politique qui s?accommodait des circonstances pour l'attirer jusqu'à lui", raconte M. Lombardi. Avec l'élection de Chavez en 1998, les deux présidents ont commencé à se voir plus fréquemment, forgeant une alliance sous l'oeil attentif de Washington. "Chavez, il faudrait le multiplier par 5.000, par 10.000, par 20.000", lance un jour le dirigeant communiste cubain, confiant à son homologue vénézuélien la bannière anti-impérialiste et le propulsant sur le scène internationale comme nouveau leader de la gauche révolutionnaire. Le pari de Castro a rapidement payé. En 2000, les deux hommes signaient un accord toujours en vigueur par lequel le Venezuela s'engageait à fournir 130.000 barils de pétrole par jour à Cuba à des tarifs préférentiels. Pour une île toujours asphyxiée suite à l'effondrement de l'Union soviétique, le soutien de Caracas, rapidement devenu le premier partenaire économique du pays, a représenté une bouée de sauvetage. Après un coup d'Etat manqué en 2002 contre Chavez, son mentor cubain lui suggère en 2003 de lancer des programmes sociaux à destination des populations les plus défavorisées. Une initiative qui l'aidera à remporter en 2004 un référendum révocatoire convoqué par l'opposition. Logement, accès aux soins médicaux, alimentation... Chavez a investi des milliards de pétro-dollars pour mettre en place ces programmes, auxquels Cuba a participé activement, en envoyant notamment des milliers de médecins et coopérants au Venezuela, mais aussi des experts militaires. Et jusqu'à la fin de sa vie, alors qu'il passait plus de temps à Cuba qu'au Venezuela pour se faire soigner de son cancer, Chavez a reçu des conseils de son mentor, lui-même retiré pour raison de santé depuis 2006, qui l'incitait à prendre mieux soin de lui.