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Marée de bonnets rouges sur Quimper contre l'écotaxe

Des manifestants jetant des chrysanthèmes contre une barricade des forces de l'ordre, à Quimper. Des heurts ont éclaté entre la police et des manifestants rassemblés pour demander la suppression de l'écotaxe poids lourds et défendre l'emploi en Bretagne. /Photo prise le 2 novembre 2013/REUTERS/Stéphane Mahé

par Pierre-Henri Allain QUIMPER, Finistère (Reuters) - Des milliers de personnes coiffées de bonnets rouges se sont rassemblées samedi à Quimper (Finistère), où des heurts ont éclaté avec la police malgré les appels au calme, pour défendre l'emploi en Bretagne et réclamer la suppression de l'écotaxe. La manifestation a rassemblé plus de 10.000 personnes selon la préfecture et plus de 30.000 personnes selon les organisateurs, réunissant salariés de l'industrie agro-alimentaire, artisans, agriculteurs, transporteurs routiers, pêcheurs et chefs d'entreprise. En milieu d'après-midi, des heurts ont éclaté entre une centaine de manifestants et les forces de l'ordre rassemblées près de la préfecture du Finistère qui ont répliqué à des jets de projectiles en faisant usage de lances à eau et de grenades lacrymogènes. La préfecture a signalé plusieurs blessés légers lors de ces échauffourées. Dans le département voisin du Morbihan, un portique de contrôle de l'écotaxe est tombé samedi après avoir été incendié par des manifestants à proximité de Saint-Allouestre. Pour symboliser les difficultés que traverse actuellement la Bretagne, notamment dans le domaine agro-alimentaire, les manifestants ont installé des dizaines de pots de chrysanthèmes multicolores près de la préfecture et aux abords de la place de la Résistance. "Tous mes voisins sont dans l'agro-alimentaire ou dans la pêche, ces chrysanthèmes, c'est pour montrer que la Bretagne est en train de mourir", a dit à Reuters Armelle, une assistante sociale de 46 ans, venue de Brest. Les manifestants portaient des bonnets rouges, en référence aux révoltes paysannes bretonnes de la fin du 17e siècle. PAS D'UNANIMITÉ Une délégation de 250 à 300 employés de l'abattoir Gad de Lampaul-Guimiliau, qui doit bientôt fermer et supprimer 850 emplois, avait fait le déplacement ainsi que des ouvriers de Marine Harvest, dont le site de Poulaouen, dans le Finistère, qui compte environ 400 postes doit aussi fermer. Portant un maillot orange frappé des mots "Marine Harvest, salariés en colère", Céline, 35 ans, travailleuse intérimaire dans cette société, s'est dite insatisfaite de la suspension de l'écotaxe décidée par le gouvernement, même si cette taxe qui devait entrer en vigueur le 1er janvier n'a pas eu d'incidence sur la situation de son entreprise. "Je demande sa suppression parce que c'est toute la Bretagne qui va être pénalisée", a-t-elle déclaré à Reuters, ajoutant qu'avec les fermetures d'usines "les commerçants, les artisans, ne pourront plus vivre". "C'est un jour qui fera date", a lancé, devant une forêt de drapeaux bretons et du haut d'un podium qui réunissait différents représentants syndicaux, le maire de Carhaix, Christian Troadec (Divers gauche). Ceint d'une écharpe aux couleurs blanches et noires de la Bretagne, l'élu a également demandé la fin du dumping social en Europe qui selon lui mine l'emploi et l'économie en Bretagne. La manifestation quimpéroise n'a toutefois pas fait l'unanimité puisque certaines organisations, telles Europe Ecologie Les Verts, la CGT, la FSU, le Parti communiste ou encore le Front de Gauche, ont appelé à un autre défilé à Carhaix, jugeant ambigus les mots d'ordre du défilé quimpérois. "A Quimper, on reste sur l'écotaxe, mais l'écotaxe ce n'est pas le problème des salariés, c'est le problème des patrons", a déclaré à Reuters Anne-Véronique Roudaut, secrétaire départementale de la CGT, syndicat par ailleurs favorable au principe de l'écotaxe pour des raisons économiques et écologiques. EELV Bretagne a estimé de son côté que la question de la taxe poids lourds n'était qu'un écran de fumée destiné à masquer les responsabilités des principaux acteurs patronaux de l'agro-alimentaire dans la faillite du modèle breton. Edité par Pascal Liétout