Explosion de l'usine AZF : un drame pas épargné par les théories du complot

20 ans après l'explosion de l'usine AZF à Toulouse, il existe toujours des incertitudes sur les circonstances du drame.

Il y a 20 ans jour pour jour, l'une des plus grandes catastrophes industrielles françaises survenait à Toulouse avec l'explosion de l'usine AZF. 10 jours après les attentats du World Trade Center, de nombreuses personnes ont refusé de croire à la thèse de l'accident.

Le 21 septembre 2001, la France est sous le choc. Dix jours après les attentats terroristes de New York qui avaient traumatisé toute la planète, l'usine AZF de Toulouse explose et provoque ce qui est à ce moment-là la catastrophe la plus grave en France depuis la Seconde Guerre mondiale. À 10h17, un stock de plus de 300 tonnes de nitrate d'ammonium explose et entraine la mort de 31 personnes, fait plus de 2 500 blessés et environ 85 000 sinistrés. Une double détonation entendue à plus de 80 km à la ronde et un séisme de magnitude 3,4 sur l'échelle de Richter est même enregistré.

Compte tenu du contexte, la piste terroriste est immédiatement évoquée, même si trois jours après la catastrophe, l'hypothèse de l'accident est privilégiée à "plus de 90%" par le procureur de la République. Jacques Chirac et Lionel Jospin privilégient également rapidement la piste de l'accident, ce qui est fortement critiqué en raison du manque d'indices ou d'éléments probants. À ce jour, certains estiment que le gouvernement de l’époque a voulu cacher la "vérité".

La piste islamiste fait surface

La piste islamiste est dans un premier temps privilégiée, particulièrement lorsque les enquêteurs découvrent que l’une des victimes, Hassan Jandoubi, un Français de 35 ans d'origine tunisienne, portait deux pantalons et plusieurs sous-vêtements, un rituel de kamikazes islamistes. Le journal Valeurs Actuelles, classé très à droite, écrivait d'ailleurs que la veille de l'explosion, Hassan Jandoubi avait eu une altercation avec un conducteur qui portait dans l'habitacle de son camion un drapeau américain et que le trentenaire avait été repéré par la police depuis plusieurs mois pour ses sympathies islamistes. Des informations que l'avocat de la famille Jandoubi a totalement démenties. Malgré l'absence de trace d'explosif sur lui, les soupçons perdurent encore, d'autant plus dans une ville comptant des foyers de radicalisation islamiste.

Un facteur a quant à lui affirmé avoir vu un hélicoptère survoler l'usine quelques minutes avant l'explosion, dont un bruit apparaît sur une bande-son d'un reportage de France 3, mais un journaliste de M6 affirme que l'hélicoptère se trouvait au-dessus du quartier voisin de Bellefontaine et non de l'usine AZF. Après enquête, il a été déclaré qu'aucun mouvement n’a été répertorié avant l'explosion et que seul l'hélicoptère de la gendarmerie est arrivé bien après pour mesurer les dégâts.

Météorite et attaque d'extraterrestres

Plusieurs autres pistes, plus ou moins farfelues, ont été évoquées comme une météorite, ou encore une attaque des extraterrestres, rapporte La Dépêche du Midi. Une bombe de la Seconde Guerre mondiale a également fait l'objet de questionnements, le site de l'AZF ayant été bombardé en 1944, mais les experts ont expliqué qu'un obus n'aurait pas pu exploser sans choc. Le gaz a été étudié comme une piste sérieuse après la catastrophe, mais aucune conduite ne passe à proximité du hangar d'où est partie l'explosion.

L'accident chimique au cœur des débats

Plusieurs scientifiques qui observent le procès estiment que la thèse développée par l'accusation pour expliquer l'explosion, c'est-à-dire un accident chimique provoqué par la mise en contact du chlore avec une demi-tonne de nitrate d'ammonium, déversés sur un tas de 300 tonnes de nitrate, ne tient pas. La Fédération française des sciences pour la chimie (FFC) estime que cela n'est pas possible, selon l'hebdomadaire L'Usine Nouvelle.

"Au contact de DCCNa, d'eau et de nitrate d'ammonium se forme du trichlorure d'azote, qui est un détonant". Mais pour que cela puisse détonner, "il faut au moins un kilo de DCCNa, de l'eau, et attendre un peu. Puis ajouter du nitrate. C'est réalisable dans des conditions en laboratoire. Mais on ne peut pas trouver ces conditions industriellement", martèle-t-il.

Lors du premier procès, en 2009, la Grande Paroisse, filiale de Total et gestionnaire du site d'AZF, ainsi que le directeur de l’usine, Serge Biechlin, qui étaient poursuivis pour "homicides involontaires par négligence ou manquement à une obligation de sécurité", ont été relaxés au bénéfice du doute malgré les "fautes organisationnelles" relevés par le tribunal.

Suite au procès en appel et en cassation de 2012 et 2015, la cour d’appel de Toulouse revoit son jugement de 2009 et estime que l'explosion a été provoquée par un mélange accidentel de produits chimiques. Grande Paroisse et Serge Biechlin sont alors reconnus coupables d'homicides, de blessures et de destructions involontaires". Le parquet général requit alors 3 ans de prison avec sursis et 45 000 euros d’amende contre Serge Biechlin et 225 000 euros contre la société mais en 2015, la Cour de cassation renvoie le dossier devant une nouvelle Cour d’appel.

Suite au 3e procès de 2017, la Cour d’appel de Paris reconnaît la culpabilité de Serge Biechlin et de la société. Le directeur de l'usine est condamné à 15 mois de prison avec sursis et 10 000 euros d’amende et la société Grande Paroisse à 225 000 euros d’amende.

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