Réélue présidente du Chili, Michelle Bachelet promet de réformer

Michelle Bachelet, qui retrouvera en mars le palais présidentiel de la Moneda au Chili, devrait favoriser un rééquilibrage de la politique étrangère de Santiago en faveur de liens plus étroits avec le Brésil et la gauche sud-américaine. /Photo prise le 16 décembre 2013/REUTERS/Ivan Alvarado

par Anthony Esposito SANTIAGO (Reuters) - Au lendemain de sa large victoire électorale au second tour de l'élection présidentielle chilienne, Michelle Bachelet, candidate de la gauche et déjà chef d'Etat entre 2006 et 2010, a réitéré lundi ses promesses de réformer la fiscalité et l'éducation. Sans surprise, Michelle Bachelet a été réélue dimanche à la tête de l'Etat avec 62% des suffrages, soit la proportion de voix la plus élevée recueillie par un candidat à la présidence depuis 1989, date à laquelle le Chili est redevenu démocratique à la suite du départ du pouvoir du général Augusto Pinochet. Après avoir très nettement battu Evelyn Matthei, la candidate conservatrice, Michelle Bachelet, qui sera investie en mars, dispose d'une large marge de manoeuvre pour mettre en oeuvre les vastes réformes qu'elle a annoncées lors de sa campagne, et qu'elle a rappelées lundi. "Nous ferons tout ce qui est en notre possible pour pouvoir immédiatement gouverner, dès que nous serons en mars, avec tous l'énergie, le dynamisme et les efforts nécessaires à l'exercice du mandat donné par le peuple", a déclaré Michelle Bachelet, lors d'une conférence de presse. Pédiatre de formation, Michelle Bachelet s'est engagée lors de sa campagne à mettre en oeuvre 50 réformes lors de ses cent premiers jours au pouvoir, qui ouvriront un mandat de quatre ans. L'ancienne présidente, à qui la Constitution interdisait de briguer un deuxième mandat consécutif en 2010 malgré sa forte popularité, est revenue à la vie politique chilienne après avoir dirigé Onu-Femmes, l'organisme des Nations unies pour l'égalité des sexes. Les analystes s'attendent à ce qu'elle réforme en priorité la fiscalité, notamment en mettant en oeuvre son engagement de porter l'impôt sur les bénéfices des sociétés de 20 à 25%, afin de dégager des fonds pour l'éducation et le système de santé. La future présidente a par ailleurs annoncé qu'elle annoncerait la composition de gouvernement lors des deux dernières semaines de janvier. Alberto Arenas, principal responsable du programme de campagne de Michelle Bachelet, est notamment favori pour occuper le ministère des Finances. SÉRIEUX BUDGÉTAIRE L'ancienne présidente a centré sa campagne sur les inégalités sociales, qui persistent au sein des 16,6 millions d'habitants et ont été au coeur du mouvement de contestation étudiante de 2011, même si le pays enregistre une forte croissance, notamment grâce à ses exportations de cuivre, et a vu la pauvreté réduire considérablement au cours des vingt dernières années. Michelle Bachelet s'est toutefois engagée à maintenir le sérieux budgétaire qui caractérise le Chili depuis le début des années 1990. Au sein de la gauche latino-américaine, son approche pragmatique dans le domaine économique la rapproche davantage de son homologue brésilienne Dilma Rousseff que des dirigeants du Venezuela ou de l'Argentine. "Il y a deux choses dont on sait qu'elles ne changent pas au Chili", souligne le politologue Patricio Navia. "La première, c'est que nous avons toujours des séismes. L'autre, c'est que depuis 1990, les gouvernements sont sérieux sur le plan budgétaire." Michelle Bachelet a, par ailleurs, annoncé son intention de réformer la Constitution héritée de la dictature du général Augusto Pinochet (1973-1990) et de dépénaliser l'avortement en cas de viol ou de danger pour la santé de la mère ou de l'enfant à naître. La mise en oeuvre de ces projets dépendra en grande partie du rapport des forces au Congrès. Sa Nueva Mayoria (nouvelle majorité) a remporté les législatives qui se sont déroulées en même temps que le premier tour, sans toutefois atteindre la majorité absolue. Or, si la majorité simple suffit à modifier la fiscalité, une majorité qualifiée est en revanche requise pour réformer l'éducation et le code électoral. Avec Rosalba O'Brien et Froilan Romero; Henri-Pierre André, Jean-Loup Fiévet, Bertrand Boucey et Julien Dury pour le service français